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celles de Lucy, au sujet de l’événement qui venait de se passer. Le premier soin de sir William, en rentrant chez lui, fut d’appeler un médecin et de s’assurer que sa fille n’avait rien à craindre des suites de la situation dangereuse et alarmante dans laquelle elle s’était trouvée. Tranquille à cet égard, il se mit à relire toutes les notes qu’il avait prises d’après la déclaration de la personne dont il s’était servi pour interrompre les funérailles du feu lord Ravenswood. Élevé dans la doctrine des casuistes, et parfaitement versé dans la pratique de l’art, ordinaire au barreau, de se servir de moyens souvent opposés, il lui en coûta peu pour adoucir dans son rapport des circonstances dont il avait cherché à exagérer la gravité. Il représenta à ses collègues dans le conseil privé la nécessité d’adopter des mesures conciliatrices avec des jeunes gens ardents, impétueux et sans expérience. Il n’hésita pas à censurer, jusqu’à un certain point, la conduite de l’officier de justice qui avait imprudemment provoqué le tumulte.

Tel était le contenu de ses lettres officielles ; celles qu’il écrivit aux amis particuliers qu’il pensait devoir être chargés de l’examen de l’affaire étaient d’une nature encore plus favorable. Il leur représenta que, dans cette circonstance, des mesures de douceur seraient à la fois politiques et populaires, au lieu que, vu le grand respect que l’on avait eu en Écosse pour les cérémonies funèbres, une trop grande sévérité envers le Maître de Ravenswood, pour avoir voulu empêcher qu’on n’interrompît celles qui avaient eu lieu à l’enterrement de son père, serait interprétée d’une manière très-préjudiciable au pouvoir. Enfin, prenant le ton d’un homme plein de générosité et qui a l’âme élevée, il demanda instamment que l’on passât légèrement sur cette affaire. Il fit, avec beaucoup de délicatesse, allusion à la position dans laquelle il se trouvait à l’égard du jeune Ravenswood, ayant toujours eu le dessus dans cette longue suite de procès qui avaient été si funestes à cette noble maison. Il déclarait que ce serait une bien grande satisfaction pour lui s’il pouvait trouver les moyens de compenser, en quelque sorte, les malheurs qu’il avait fait éprouver à la famille, quoiqu’il n’eût agi que pour la défense de ses droits légitimes. Il les priait donc avec ardeur et demandait comme faveur personnelle que l’on ne donnât aucune suite à cette affaire. Il faisait entendre qu’il désirait qu’on lui attribuât le mérite de l’avoir assoupie, par suite du rapport favorable qu’il avait fait et de sa propre intercession. Il est très-remarquable que, contre son usage