Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/529

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En un mot, tout ceci m’inquiète, je vous le dis sérieusement. Peut-être, ajouta-t-il d’un ton plus grave, ne prendrais-je pas le soin de vous troubler de mes réflexions à ce sujet, si vous et Annette étiez seuls intéressés dans cet amour ; mais vous avez dans Mac-Aulay un dangereux rival ; j’ignore jusqu’où peut le porter son ressentiment ; et il est de mon devoir de vous dire que les dissensions qui pourraient s’élever entre vous ne manqueraient pas d’être préjudiciables aux intérêts du roi. — Je suis persuadé, milord, que cette observation vous est dictée par la bonté de votre cœur et par votre amitié pour moi ; mais j’espère que vous serez pleinement satisfait quand je vous donnerai l’assurance que nous avons eu une explication, Allan et moi, à ce sujet, et que je l’ai convaincu que rien n’est plus éloigné de mon caractère de concevoir des vues injurieuses sur une jeune fille sans protection, et que, d’un autre côté, l’obscurité de sa naissance m’empêche de songer à l’épouser. Je ne cacherai pas à Votre Excellence ce que je n’ai pas déguisé à Mac-Aulay : c’est que si Annette Lyle était d’une origine noble, je lui aurais offert de partager mon nom et mon rang ; mais dans un pareil état de choses, cela est impossible. Cette explication vous satisfera, je l’espère, milord, puisqu’une personne beaucoup moins raisonnable que vous s’en est contentée. — Et comme deux véritables rivaux de roman, dit Montrose en haussant les épaules, vous êtes convenus de vous dévouer tous deux au culte de la même maîtresse, d’adorer la même idole, et de ne pas étendre plus loin vos prétentions réciproques ? — Je n’ai pas été aussi loin, milord, répondit Menteith ; j’ai seulement dit que, dans les circonstances actuelles (et il n’y a aucune apparence qu’elles puissent changer), je ne pouvais, par égard pour ma famille et pour moi-même, entretenir d’autres relations avec Annette Lyle que celles d’un ami et d’un frère. Mais veuillez m’excuser, milord, » dit-il en montrant son bras enveloppé de son mouchoir, « j’ai une légère blessure à faire panser. — Une blessure ! s’écria Mortrose avec inquiétude ; montrez-la-moi. Hélas ! continua-t-il, je n’en aurais point entendu parler, si je n’avais pas voulu sonder une autre plus secrète et plus dangereuse ! Menteith, je vous plains ;… mais aussi j’ai connu… Mais à quoi sert de réveiller des douleurs assoupies depuis long-temps ? »

En finissant ces mots, il serra la main de son noble parent et se dirigea vers le château.