Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/521

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le Loch-Eil. Convaincu des conséquences funestes qui pouvaient résulter de la moindre dissension dans son armée, il poussa son cheval vers le lieu du combat, et voyant Mac-Eagh renversé par terre, et Dalgetty paraissant, d’après son altitude, le défendre de la fureur de Mac-Aulay, sa pénétration lui fit deviner à l’instant la cause de la querelle, et sur-le-champ il imagina le moyen de l’arrêter.

« Quoi, messieurs ! s’écria-t-il, de nobles cavaliers osent se prendre de querelle sur le champ glorieux de la victoire ! Êtes-vous fous ? et la gloire que vous avez acquise tous deux aujourd’hui vous a-t-elle enivrés au point de vous faire perdre la raison ? — Que Votre Excellence me permette de lui dire qu’il n’y a pas de ma faute dans cette affaire, répondit Dalgetty ; j’ai toujours été reconnu dans tous les pays de l’Europe où j’ai servi comme bonus socius[1] ; mais celui qui porte la main sur un homme placé sous ma sauvegarde… — Et celui, dit Allan en l’interrompant, qui ose arrêter le cours de ma juste vengeance… — Fi, messieurs, répéta Montrose ; lorsque vous m’êtes nécessaires tous deux ! lorsque j’ai à vous confier des affaires de la plus haute importance, vous vous occupez d’une querelle personnelle ! Vous choisirez un moment plus convenable pour régler vos différends. Quant à vous, major Dalgetty, mettez un genou en terre. — Un genou en terre ! répéta Dalgetty ; voilà un ordre auquel je n’ai pas encore appris à obéir, excepté quand il m’est donné du haut de la chaire. Chez les Suédois, le premier rang met un genou en terre, il est vrai, mais seulement lorsque le régiment est rangé sur six lignes. — Quoi qu’il en soit, pliez le genou, au nom du roi Charles et de son représentant. »

Dalgetty obéit, quoique avec répugnance, et Montrose le frappa légèrement du plat de son épée. « En conséquence de tes vaillants services pendant ce jour, lui dit-il, et au nom et par l’autorité de notre souverain, le roi Charles, je te crée chevalier : sois brave, loyal et heureux. Et maintenant, sir Dugald Dalgetty, à votre poste : rassemblez tous les cavaliers que vous pourrez réunir, et poursuivez ceux des ennemis qui fuient vers le lac ; tenez toujours votre troupe en bon ordre, et ne vous hasardez pas trop loin ; bornez-vous à empêcher l’ennemi de se rallier : vous n’aurez pas besoin de faire de grands efforts pour y parvenir. À cheval, sir Dugald, et marchez à votre devoir. — Et comment monterai-je à cheval ? reprit le nouveau chevalier. Mon

  1. Bon compagnon. a. m.