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que l’ardeur qui les animait. Auchenbreck voulait commencer le combat en attaquant les avant-postes de l’ennemi ; mais Argyle, plus circonspect et plus politique, préféra rester sur la défensive.

Bientôt ils reconnurent, aux signaux qu’ils entendirent, qu’ils n’attendraient pas long-temps. Ils pouvaient reconnaître les marches guerrières qui, à mesure que les divers clans approchaient, retentissaient dans les gorges des montagnes. Celle des Camerons surtout, remarquable par ces paroles sinistres adressées aux loups et aux corbeaux : « Venez à moi, je vous donnerai de la pâture, » était répétée par les échos dans leurs vallées natales. Pour parler le langage des bardes des montagnes, « la voix de guerre de Glengary n’était pas silencieuse ; » et les airs guerriers des autres tribus se faisaient entendre distinctement, à mesure qu’elles arrivaient à l’extrémité des montagnes d’où elles devaient descendre dans la plaine.

« Vous voyez, dit Argyle à ses capitaines, que, comme je vous le disais, nous n’avons affaire qu’à nos voisins : James Graham ne s’est pas hasardé à déployer sa bannière devant nous. »

Au moment même le son éclatant des trompettes résonna dans les montagnes, et les chefs reconnurent l’air par lequel, selon l’ancienne coutume écossaise, on saluait l’étendard royal.

« Voici, milord, dit sir Duncan Campbell, des sons qui annoncent que celui qui prétend être le lieutenant du roi est en personne dans cette armée. — Il est probable qu’il a de la cavalerie avec lui, reprit Auchenbreck, ce que je n’aurais pas présumé. Mais reculerons-nous pour cela, milord, et nous laisserons-nous intimider lorsque nous avons des ennemis à combattre et des injures à venger. »

Argyle garda le silence, et jeta un regard sur son bras qu’il portait en écharpe par suite d’une chute qu’il avait faite quelques jours auparavant.

« Il est vrai, » dit vivement Ardenvohr, » vous êtes hors d’état, milord, de manier l’épée ou le pistolet ; retirez-vous à bord de la galère ; votre vie nous est précieuse comme chef, et dans ce moment votre bras ne peut nous être utile comme soldat. — Non, » dit Argyle, dont l’orgueil luttait contre l’irrésolution, « il ne sera jamais dit que j’ai fui devant Montrose ; si je ne puis combattre, je mourrai du moins au milieu de mes enfants.

Plusieurs autres chefs des Campbells se réunirent aux deux premiers pour conjurer leur chef de laisser le commandement à Ardenvohr et à Auchenbreck, et de regarder le combat d’une dis-