Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/497

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gnes, ne se fit pas prier pour faire honneur à ce repas : il l’expédia si promptement, que le comte, tout en remplissant une coupe de vin et la vidant à sa santé, ne put s’empêcher de faire à haute voix la remarque que, quelque grossiers que fussent les vivres que l’on trouvait dans son camp, il craignait fort que le major Dalgetty n’eût fait plus mauvaise chère encore pendant son excursion dans l’Argyleshire.

« Votre Excellence peut en répondre sur son corps, » répondit le major en parlant la bouche pleine, « car la nourriture que me donnèrent ces Enfants du Brouillard pauvres créatures dénuées de tout ! était si peu substantielle, que lorsque je revêtis de nouveau mon armure, que j’avais été contraint d’abandonner pour faciliter ma retraite, je dansais dedans comme l’amande sèche d’une noix conservée d’une année à l’autre. — Il faut s’occuper de réparer ces pertes, major Dalgetty. — En vérité, milord, il me sera difficile d’y parvenir, à moins que mon arriéré ne soit converti en paie régulière, car je proteste à Votre Excellence que tout l’embonpoint que j’avais gagné au service des états de Hollande, qui payaient leurs troupes avec une régularité exemplaire, je l’ai perdu au service de Votre Excellence. — En ce cas, mon cher major, vous n’en marcherez que plus lestement. Quant à votre paie, que nous obtenions une victoire, une seule victoire, major, et vos désirs, tous vos désirs seront comblés. En attendant, remplissez de nouveau votre coupe. — À la santé de Votre Excellence ! » dit le major remplissant son verre jusqu’au bord pour montrer le zèle avec lequel il portait ce toast : « à votre santé, et à vos succès contre tous vos ennemis, particulièrement contre Argyle ! Je lui ai déjà mis la main sur la barbe, j’espère bien recommencer. — Très bien, reprit Montrose ; mais, pour en revenir à ces Enfants du Brouillard, vous comprenez, Dalgetty, que leur présence ici et le motif pour lequel nous les employons doivent être un secret entre vous et moi. »

Charmé, comme Montrose l’avait prévu, de cette marque de confiance de son général, le major posa le doigt sur le bout de son nez et fit un signe d’intelligence.

« Combien Ranald peut-il avoir de compagnons ? demanda Montrose. — Ils ne sont plus guère, je crois, que huit ou dix hommes, sans compter les femmes et les enfants. — Où sont-ils maintenant ? — Dans une vallée à trois milles d’ici, où ils attendent les ordres de Votre Excellence. Je n’ai pas jugé à propos de