Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/491

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tendu à obtenir la prééminence dans leurs conseils et celle du commandement ; mais ils jugèrent plus à propos de confier ces hauts emplois à Argyle, dont la puissance était plus étendue et les talents moins élevés. Cette préférence fut un affront que Montrose ne pardonna jamais aux presbytériens, et encore moins à Argyle, qui lui avait été préféré. Il était donc en proie à tous les sentiments haineux qui, dans les guerres civiles, pouvaient s’emparer d’une âme ardente et fougueuse et l’exciter à tirer vengeance de l’ennemi de sa maison, de son ennemi personnel ; et il est probable que ces motifs particuliers agirent fortement sur son esprit, lorsqu’il trouva la majeure partie de ses partisans déterminés à entreprendre une expédition contre les domaines d’Argyle plutôt qu’à faire une descente dans les basses terres.

Cependant, malgré tout le désir que Montrose éprouvait d’attaquer la province d’Argyle, il ne pouvait renoncer au projet glorieux qu’il avait conçu d’abord. Il tint à ce sujet plus d’une fois conseil avec ses principaux chefs, et combattit un projet auquel sa propre inclination l’entraînait, mais dont il pressentait les fâcheux résultats. Il leur représenta la difficulté extrême de faire irruption par l’est dans l’Argyleshire, même avec une armée de montagnards ; que les chemins étaient presque impraticables même pour des bergers et des chasseurs de daims, au milieu des montagnes que les dans qui en étaient les plus voisins ne connaissaient qu’imparfaitement. Ces difficultés étaient augmentées encore par la saison qui commençait à devenir rigoureuse, car décembre s’avançait à grands pas, époque où le passage de ces montagnes, déjà périlleux par lui-même, devient tout à fait impraticable dans les ouragans et par la neige qui les accompagne.

Ces objections ne satisfirent point les chefs, qui insistèrent sur l’ancienne méthode de faire la guerre en enlevant les troupeaux qui, selon l’expression gaélique, « paissent dans les pâturages de l’ennemi. » Le conseil se sépara fort avant dans la nuit, sans avoir pris aucune décision, si ce n’est que les chefs qui tenaient pour le projet d’envahissement du comté d’Argyle promirent de choisir, parmi les hommes de leurs clans, ceux qui seraient le plus capables de servir de guides pour cette expédition.

Montrose, retiré dans la cabane qui lui servait de tente, s’étendit sur un lit de fougère sèche, le seul qui se trouvait dans ce lieu. Vainement y chercha-t-il le sommeil ; les visions brillantes et trompeuses de l’ambition l’éloignèrent de ses yeux fati-