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bat corps à corps, leurs ennemis étant plus agiles et plus vigoureux qu’eux. Beaucoup furent tués dans le combat, et un si grand nombre périrent en fuyant, que les covenantaires perdirent, dit-on, plus d’un tiers des leurs à cette bataille. Cependant il faut comprendre dans ce nombre une grande quantité de gros bourgeois qui perdirent haleine dans leur fuite, et moururent ainsi sans recevoir un seul coup d’épée[1].

Les vainqueurs s’emparèrent de Perth, où ils trouvèrent des sommes d’argent considérables, ainsi que des armes et des munitions ; mais ces avantages étaient balancés par l’inconvénient toujours inséparable d’une armée de Highlanders. Les clans ne pouvaient nullement se considérer comme des soldats réguliers et agir comme tels.

Même dernièrement, dans les années 1740-46, lorsque le chevalier Charles Édouard, pour faire un exemple, fit fusiller un soldat déserteur, les Highlanders qui composaient son armée en ressentirent autant d’indignation que de surprise. Ils ne pouvaient concevoir en vertu de quel principe de justice on ôtait la vie à un homme, uniquement parce qu’il se retirait chez lui lorsqu’il ne lui convenait pas de rester plus long-temps à l’armée. Telle avait été du moins la pratique uniforme de leurs pères. Une fois la bataille terminée, la campagne était, suivant eux, terminée aussi : vaincus, ils cherchaient leur salut dans leurs montagnes ; vainqueurs, il y retournaient pour mettre leur butin en sûreté. D’autres fois, et suivant les saisons, ils avaient leurs troupeaux à surveiller, leurs semailles à faire, leurs moissons à récolter, sans quoi leurs familles eussent péri de faim. Dans tous les cas, ils quittaient le service pour quelque temps ; et quoiqu’il fût assez facile de les rappeler en leur présentant la perspective de nouvelles aventures et d’un butin plus considérable, le fruit de la victoire était perdu pour toujours

Cette circonstance démontre clairement, si déjà l’histoire ne nous le prouvait pas, que les Highlanders n’avaient jamais fait de guerres de conquêtes, mais des guerres de déprédation. Cela explique aussi la raison pour laquelle Montrose, malgré ses brillants succès, ne parvint jamais à s’établir d’une manière permanente dans les basses terres, et pourquoi même

  1. Nous citons, à l’appui de ce que nous avons avancé, une autorité. « Un grand nombre de bourgeois furent tués, dont vingt-cinq propriétaires de Saint-André ; beaucoup tombèrent, pendant respiration dans la fuite, et moururent sans être blessés. » (Lettres de Baillie, vol. II, p. 92.)