Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/411

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lui restait plus donc, pour terminer, qu’à conjurer les nobles chefs assemblés de mettre de côté toute considération secondaire, et de joindre leurs noms et leurs bras pour la défense de la cause commune. Ils devaient envoyer la croix de feu[1] dans leurs clans, avec l’ordre de rassembler toutes leurs forces disponibles, et de les réunir avec assez de célérité pour ne pas laisser à l’ennemi le temps de se préparer, ou de revenir de la terreur panique où le jetterait le premier son de pibroch. Lui-même, quoique n’étant pas un des nobles les plus riches et les plus puissants de l’Écosse, il sentait qu’il avait à soutenir la dignité d’une maison ancienne et honorable, et il était résolu de se vouer à cette cause corps et biens. Enfin, si ceux qui étaient plus puissants se montraient aussi zélés que lui, il répondait qu’ils mériteraient les remercîments de leur roi et la reconnaissance de la postérité. »

De nombreux applaudissements suivirent la harangue de lord Menteith, et lui prouvèrent que l’assemblée entière partageait ses sentiments. Lorsque les marques d’approbation eurent cessé, les chefs se regardèrent les uns les autres, comme s’il fût encore resté quelque chose à décider. Après quelques chuchotements entre eux, un vieillard, que ses cheveux gris rendaient respectable, quoiqu’il ne fût pas un chef d’un rang supérieur, répondit en ces termes à lord Menteith :

« Thane de Menteith, vous avez bien parlé, et il n’est pas un de nous qui ne se sente au fond de son âme animé des mêmes sentiments que vous ; mais ce n’est pas par la force seule que l’on gagne des batailles : la tête du général contribue au gain d’une victoire aussi bien que le bras du soldat. Qui lèvera et portera la bannière sous laquelle nous sommes invités à nous ranger ? S’attend-on à ce que nous exposions nos enfants, la fleur de nos parents, avant de savoir à quel chef nous les confierons ? Ce serait mener à la boucherie ceux que les lois divines et humaines vous font un devoir de protéger. Où est la commission du roi qui engage ses sujets à prendre les armes ? Tout simples et grossiers que nous paraissons être, nous connaissons aussi bien les lois de la guerre que celles de notre pays, et nous ne nous armerons point contre la paix générale, si ce n’est que d’après les commandements exprès du roi et après avoir reconnu pour notre chef un homme digne de

  1. The fiery cross était une proclamation de guerre. La croix de feu était une croix brûlée à ses extrémités, et teinte dans le sang d’une chèvre. On la portait dans tous les districts, et à sa vue tous les hommes, depuis quinze jusqu’à soixante ans devaient prendre les armes. a. m.