Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/408

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si un musicien italien eût été enterré même à dix milles de là, il serait ressuscité pour fuir cette musique.

Les chieftains, pendant ce temps, s’étaient assemblés en comité secret dans la grande salle du château. Parmi eux on voyait les plus puissants personnages des Highlands ; quelques-uns étaient attirés par amour pour la cause royale, et beaucoup par haine pour cette domination que le marquis d’Argyle exerçait sur ses voisins des Highlands, depuis qu’il avait une si grande influence dans le gouvernement. Cet homme d’état, il est vrai, quoique doué de beaucoup de talents et possédant un grand pouvoir, avait des défauts qui le rendaient impopulaire parmi les chefs highlanders. La dévotion qu’il professait était d’un caractère morose et fanatique ; son ambition paraissait insatiable, et les chefs inférieurs se plaignaient de son manque de bonté et de libéralité. Ajoutez à cela que, quoique Highlander et d’une famille distinguée par sa valeur, avant et après cette époque, Gillespie Grumach[1] (c’était la distinction personnelle qu’il avait dans les Highlands, où les titres d’honneur sont inconnus) passait plutôt pour un homme de guerre. Lui et sa tribu étaient particulièrement en querelle avec les Mac Léans, deux familles nombreuses qui, quoique divisées par d’anciennes haines, avaient la même horreur pour les Campbells, ou, comme on les appelait pour les enfants de Diarmid.

Pendant quelque temps les chefs assemblés gardèrent le silence, attendant que quelqu’un prît la parole sur le motif de leur réunion. À la fin, l’un des plus puissants ouvrit la diète par ces mots : « Nous avons été appelés ici, Mac-Aulay, pour débattre des matières importantes sur les affaires du roi et de l’état, et nous demandons à savoir qui nous les expliquera. »

Comme ce n’était point par l’éloquence que brillait Angus, il exprima son désir que lord Menteith ouvrît le conseil, et ce fut avec autant de modestie que de noblesse que le jeune lord leur dit qu’il eût souhaité que ce qu’il allait proposer fût venu d’une personne d’un caractère plus connu et mieux établi. Puisque cependant on lui avait cédé la parole, il annonçait aux chefs ici assemblés, que ceux qui voulaient secouer le joug indigne que le fanatisme s’efforçait d’imposer sur leurs têtes, n’avaient pas un moment à perdre. « Les covenantaires, dit-il, après avoir deux

  1. Grumach, disgracieux : ce nom lui venait de ce que ses yeux étaient louches. a. m.