Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/392

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rendez-vous de la jeunesse du clan, que jusqu’ici il avait paru éviter avec tant de soin ; il prenait part à leurs exercices, et, par sa force corporelle extraordinaire, il surpassa bientôt son frère et les autres jeunes gens d’un âge même beaucoup plus avancé que lui. Ceux qui jusqu’alors l’avaient méprisé, le craignaient maintenant s’ils ne l’aimaient pas ; et au lieu de regarder Allan comme un garçon rêveur, efféminé, et d’un esprit faible, ceux qui étaient en relation avec lui dans les jeux ou les exercices militaires, se plaignaient de ce que, échauffé par le combat, il était trop porté à prendre le jeu au sérieux, et à oublier qu’il faisait seulement avec un ami l’essai de ses forces. — Mais je parle à des oreilles sourdes, » dit lord Menteith en s’interrompant, car le nez du capitaine faisait alors entendre d’une manière indubitable qu’il était plongé dans les bras du sommeil. — Si vous parlez des oreilles de ce pourceau qui ronfle, milord, dit Anderson, elles sont, il est vrai, faites pour tout ce que vous direz ; néanmoins cette chambre étant convenable pour un entretien particulier, j’espère que vous aurez la bonté de continuer pour Sibbald et pour moi. Il y a quelque chose d’attachant et de farouche dans l’intérêt qu’inspire l’histoire de ce pauvre jeune homme.

« Vous saurez donc, reprit lord Menteith, qu’Allan continua à augmenter en force et en agilité jusqu’à sa quinzième année : vers cette époque, il prit un caractère tout à fait indépendant ; il supportait impatiemment les remontrances, et son père, qui vivait encore, en fut très-alarmé. Il s’absentait des jours et des nuits entières, errant dans les bois sous prétexte de chasser, quoiqu’il ne rapportât jamais aucun gibier. Son père en était d’autant plus effrayé, que les Enfants du Brouillard, encouragés par les troubles croissants de l’état, s’étaient hasardés à revenir dans leur ancien repaire, et qu’il ne pensait pas qu’il fût prudent de renouveler une attaque contre eux. Le danger que courait Allan dans ses excursions d’éprouver les effets de la vengeance de ces brigands, était un sujet continuel de craintes.

« J’étais moi-même au château lorsque la crise arriva. Allan courait les bois depuis le point du jour, et je l’avais cherché en vain ; la nuit était déjà bien noire, et il ne revenait pas. Son père exprimait toute son inquiétude, il parlait d’envoyer au point du jour à sa recherche, lorsque, au moment où nous nous mettions à table pour souper, la porte s’ouvrit tout à coup, et Allan entra dans la chambre d’un air fier, ferme et confiant ; son caractère