Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/287

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si cet homme s’obstine à garder le silence… — Il ne le gardera point, répondit Lucy ; il y a six semaines que je lui ai envoyé, par une voie sûre, un duplicata de ma première lettre. — Vous ne l’avez point fait !… vous n’avez pu, vous n’auriez pas osé le faire ! » s’écria lady Ashton avec un emportement qui s’accordait peu avec le ton qu’elle s’était proposé de prendre. Mais se contraignant aussitôt : « Ma chère Lucy, dit-elle, comment avez-vous pu faire une telle démarche ? — N’importe, dit Bucklaw, je respecte la façon de penser de miss Ashton ; seulement, je regrette de n’avoir pas été moi-même le porteur du message. — Et dites-nous, je vous prie, miss Ashton, » lui demanda sa mère d’un ton ironique, « combien de temps nous devons attendre le retour de votre Pacolet, de votre messager aérien, puisque nos humbles courriers de chair et d’os n’étaient pas dignes d’une pareille confiance. — J’ai compté les semaines, les jours, les heures et les minutes, répondit Lucy ; encore une semaine, et j’aurai une réponse, ou je devrai croire qu’il est mort. — Jusque-là, monsieur, dit-elle à Bucklaw, je vous aurai une bien grande obligation, si vous voulez prier ma mère de ne plus me presser sur ce sujet. — J’en fais à lady Ashton la demande formelle, dit Bucklaw. Sur mon honneur, miss Lucy, je respecte vos sentiments, et quoique je désire plus vivement que jamais la conclusion de cette affaire, je vous jure, foi de gentilhomme, que j’y renoncerais si l’on vous pressait de manière à vous causer un seul instant de désagrément. — Monsieur Hayston, je pense, ne doit rien craindre de semblable, » dit lady Ashton pâlissant de colère, « lorsque le cœur d’une mère veille sur le bonheur de sa fille. Permettez-moi de vous demander, miss Ashton, quels étaient les termes de votre dernière lettre ? — Exactement les mêmes, madame, que ceux que vous m’aviez dictés précédemment. — Ainsi donc, dès que ces huit jours seront écoulés, » dit sa mère en reprenant son ton de tendresse, nous pourrons espérer, ma chère enfant, que vous mettrez fin à notre incertitude. — Miss Ashton ne doit pas être serrée de si près, madame, » interrompit Bucklaw dont l’étourderie et l’humeur bizarre ne provenaient nullement d’un défaut de délicatesse ; « des messagers peuvent être arrêtés, ou retardés ; un cheval déferré a quelquefois fait perdre une journée entière. Permettez-moi de jeter un coup d’œil sur mon agenda. Le vingtième jour, à partir de celui-ci, est la fête de Saint Jude ; et, la veille, il faut que je sois à Caverton-Edge pour voir une