Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/276

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Il écrivit une troisième lettre adressée à Lucy, et le messager reçut l’ordre de chercher quelque moyen sûr de la lui remettre secrètement. Cette lettre contenait les plus vives protestations d’un amour constant, et parlait surtout d’un prochain changement dans la position de Ravenswood, changement d’autant plus avantageux qu’il tendrait à écarter tous les obstacles qui s’opposaient à leur union. Il l’informait des démarches qu’il avait faites pour vaincre les préjugés de ses parents, surtout ceux de sa mère, et exprimait l’espoir d’un résultat favorable ; s’il en était autrement, il se flattait encore que son absence d’Écosse, pour remplir une mission importante et honorable, donnerait aux préjugés le temps de se dissiper, et que la constance de miss Ashton, sur laquelle il comptait aveuglément et sans le moindre doute, triompherait de tout ce que l’on pourrait tenter pour lui faire rétracter l’engagement qu’il avait pris avec lui. Il y avait dans cette lettre beaucoup d’autres choses qui, bien que fort intéressantes pour les deux amants, ne le seraient nullement pour le lecteur, à qui elles n’apprendraient rien qu’il ne sache déjà.

Le Maître de Ravenswood reçut une réponse à chacune de ces trois lettres, mais par des voies différentes et dans des styles bien différents aussi.

La réponse de lady Ashton lui fut apportée par son messager lui-même, à qui elle ne permit de rester à Ravenswood que le temps qui lui fut nécessaire pour écrire ce qui suit :

« Monsieur l’inconnu,

« J’ai reçu une lettre, signée Edgar, Maître de Ravenswood ; je ne sais qui l’a écrite, puisque cette famille a été dégradée pour cause de haute trahison, en la personne d’Allan, feu lord Ravenswood.

« Si, par hasard, monsieur, vous êtes la personne qui prend ce titre, je veux bien vous dire que je réclame le plein exercice des droits d’une mère sur miss Ashton, de la main de laquelle j’ai irrévocablement disposé en faveur d’un époux digne d’elle. J’ajouterai, monsieur, que, lors même qu’il en serait autrement, je ne prêterais point l’oreille à une proposition de votre part, ni de qui que ce soit de votre famille ; car elle s’est constamment montrée contraire à la liberté des sujets et aux immunités de l’Église de Dieu. Ce n’est pas le souffle léger d’une prospérité éphémère qui peut me faire changer d’opinion à cet égard. De même