Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/214

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si vous voulez, je vais faire seller mon cheval. — Il faut attendre du moins que vous sachiez où vous devez aller et ce que vous devez faire, reprit Bucklaw. Vous savez que j’ai une parente dans le Northumberland ; lady Blenkensop est son nom ; j’eus le malheur de perdre ses bonnes grâces dans ma pauvreté, et elle me rend ses faveurs aujourd’hui que le soleil de la fortune est venu m’éclairer. — Au diable ces misérables à double face ! » s’écria héroïquement Craigengelt. « Quant à cela, il faut que je le dise à la louange de John Craigengelt, il est l’ami de son ami, dans la bonne comme dans la mauvaise fortune, dans la pauvreté comme dans la richesse. Vous en savez quelque chose, Bucklaw. — Je n’ai pas oublié votre fidélité, dit son patron ; je me rappelle que dans mon malheur vous aviez envie de me pousser au service du roi de France ou du Prétendant, et de plus, que vous m’avez prêté une vingtaine de pièces d’or, quand, ainsi que je le crois fermement, vous avez appris que la vieille lady Girnington avait fait connaissance avec la mort ; mais ne vous chagrinez pas, John ; je crois, après tout, que vous m’aimez assez à votre manière, et mon malheur est de n’avoir pas de meilleur conseiller pour le moment. Pour en revenir à cette lady Blenkensop, il faut que vous sachiez qu’elle est la favorite de la duchesse Sarah… — Quoi ! de Sarah Jennings ? s’écria Graigengelt ; eh bien, il faut qu’elle soit douée d’une vertu transcendante. — Taisez-vous et gardez votre langue de rebelle pour vous, si c’est possible, dit Bucklaw. Je vous dis que, par l’intermédiaire de la duchesse de Marlborough, ma cousine de Northumberland s’est liée intimement avec lady Ashton, la femme du lord garde des sceaux, ou, pour mieux dire, la gardienne du garde des sceaux : elle a accordé à cette lady Blenkensop la faveur de lui rendre une visite en revenant de Londres, et dans ce moment elle est à son vieux château, sur les bords de Wansbeck. Enfin, comme il est convenu parmi ces dames que leurs maris ne sont pour rien dans leur famille, il leur a plu, sans consulter sir William, de mettre sur le tapis une alliance matrimoniale entre Lucy Ashton et mon aimable personne. Lady Ashton s’érigeant en plénipotentiaire du côté de sa fille et de son mari, et la mère Blenkensop, sans y être aucunement autorisée, me faisant l’honneur de me représenter, vous devez penser que j’ai été fort surpris quand j’ai su qu’une chose qui me concerne de si près était si avancée sans qu’on eût demandé mon avis. — Je veux être capot si c’était dans les règles du jeu, dit le confident. — Et