Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/157

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

caves de Wolf’s-Crag ; il ajouta encore que, quoiqu’il ne lui appartînt pas de parler devant Leurs Seigneuries, il pouvait assurer que l’eau-de-vie était une liqueur bien connue ; qu’elle était douce comme de l’hydromel et forte comme Samson ; qu’elle était dans la maison depuis le festin mémorable où le vieux Mickletob avait été tué sur le haut de l’escalier, par Jacques de Jenklebrae, en l’honneur de lady Muirend, presque alliée de la famille.

« Mais pour abréger le discours, monsieur Caleb, dit le garde des sceaux, vous me ferez peut-être la faveur de m’accorder une cruche d’eau ? — À Dieu ne plaise que Votre Seigneurie boive de l’eau dans cette famille ! ce serait à la honte d’une maison aussi honorable. — Néanmoins, si Sa Seigneurie a cette fantaisie, » dit le Maître en souriant, « je crois que vous pourriez la satisfaire car, si je ne me trompe, il n’y a pas long-temps que l’on a bu de l’eau ici et avec beaucoup de plaisir. — Sans doute, si c’est une fantaisie de Sa Seigneurie, » dit Caleb en rentrant avec un pot de ce pur liquide, « je crois qu’elle ne trouvera nulle part de l’eau semblable à celle qu’on tire du puits de Wolf’s Crag. Néanmoins… — Néanmoins il faut laisser le Seigneur garde des sceaux, afin qu’il puisse se reposer dans cette pauvre chambre, » dit le Maître de Ravenswood en interrompant son serviteur babillard, qui se retourna aussitôt vers la porte, et, faisant un profond salut, se prépara à escorter son maître hors de la chambre secrète.

Mais le lord Keeper s’opposa à son départ. « Je n’ai qu’un mot à dire au Maître de Ravenswood, monsieur Caleb, et je pense qu’il voudra bien vous dispenser de l’attendre. »

Caleb fit un salut encore plus profond que le premier et se retira. Son maître resta immobile, attendant dans le plus grand embarras ce qui terminerait une journée remplie d’incidents imprévus.

« Maître de Ravenswood, » dit sir William Ashton avec quelque embarras, « j’espère que vous connaissez trop bien la loi chrétienne pour permettre que le soleil se couche sur votre colère ? »

Le Maître rougit et répondit qu’il ne voyait pas l’occasion d’exercer ce soir les devoirs que lui recommandait sa foi chrétienne. « J’aurais pensé tout autrement, dit son convive, si nous considérons les différents sujets de dispute et de litige qui se sont malheureusement présentés, plus fréquemment que je ne l’aurais désiré, entre feu l’honorable seigneur votre père et moi-même. — Je désirerais, milord, » dit Ravenswood avec une émotion qu’il