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la poitrine du cerf, afin de reconnaître la qualité de la venaison. Il fut tenté de la saluer ; mais éloigné, par son genre de vie, des classes élevées de la société, il éprouvait, malgré son audace naturelle, une espèce d’embarras et de mauvaise honte lorsqu’il voulait adresser la parole à une dame d’un rang distingué.

À la fin, rassemblant tout son courage, il eut assez de résolution pour approcher de la belle chasseresse et lui dire qu’il espérait que son amusement avait répondu à son attente. La réponse de la dame fut polie et modeste, et elle témoigna de la gratitude au brave cavalier qui avait clos la chasse avec tant d’adresse, lorsque les chiens et les chasseurs paraissaient n’oser s’avancer.

« Madame, » dit Bucklaw, que cette observation ramena aussitôt sur son terrain, « La chose n’est pas difficile, et il n’y a pas de mérite dans tout cela, pourvu qu’on n’ait pas trop peur d’avoir une paire de cornes enfoncée dans le ventre. J’ai chassé plus de cinq cents fois, madame, et je n’ai jamais vu le cerf aux abois, soit sur terre, soit dans l’eau, que je ne me sois hardiment avancé sur lui. Il ne faut que de l’usage et de la pratique, et cependant je vous dirai, madame, qu’il faut beaucoup d’attention et de prudence ; et vous ferez bien, madame, d’avoir votre couteau de chasse bien affilé et à double tranchant, afin que vous puissiez frapper en avant, ou en arrière, suivant que vous le trouverez nécessaire ; car une blessure faite par un coup de corne est dangereuse et sujette à s’envenimer. — Je pense, monsieur, dit la jeune dame, » dont le masque cachait avec peine le sourire, « que j’aurai bien rarement occasion de prendre de semblables précautions. — Mais, avec tout cela, ce que monsieur dit est très-juste, » s’écria un vieux chasseur, qui avait écouté la harangue du Bucklaw et en avait été très-édifié ; « et j’ai entendu dire à mon père, qui était un forestier à Cabrach, que la morsure du sanglier était plus facilement guérie que la blessure faite par la corne du cerf, comme l’expriment ces vers du vieux chasseur :

« Si du cerf la corne vous blesse,
Sa blessure vous fait mourir ;
Mais du sanglier que l’on presse,
La blessure se peut guérir. »

— Si j’avais un avis à donner, » continua Bucklaw, placé sur son terrain, et qui désirait diriger toutes les opérations, « comme les chiens sont fatigués, la tête du cerf devrait leur être distribuée pour les récompenser ; et s’il m’est permis de parler, le chef des