Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/77

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qui n’étaient jamais arrivés à la famille depuis le temps de Malcolm Canmore ! »

Le respect que Mause portait à sa maîtresse était extrême ; elle hésita, et prouva la difficulté qu’elle avait à se détendre, en toussant une ou deux fois.

À coup sûr, milady… hem, hem !… À coup sûr, je suis fâchée… très-fâchée que quelque déplaisir soit arrivé,… mais l’indisposition de mon fils… — Ne me parlez pas de l’indisposition de votre fils, Mause ! s’il eût été vraiment malade, vous seriez venue à la tour à la pointe du jour chercher quelque chose pour le soulager ; j’ai guéri plusieurs maladies avec mes recettes, vous le savez parfaitement. — Oh ! oui, milady ! je sais très-bien que vous avez fait des cures merveilleuses ; la dernière chose que vous avez envoyée à Cuddie lorsqu’il avait la colique, fit sur lui l’effet d’un charme. — Pourquoi donc, femme, si vous aviez réellement besoin de quelque chose, ne vous êtes-vous pas adressée à moi ? Mais vous n’aviez besoin de rien, indigne et ingrate vassale que vous êtes ! — Votre Seigneurie ne m’a jamais appelée ainsi. Hélas ! pourquoi ai-je vécu assez long-temps pour être nommée de la sorte, » continua-t elle en fondant en larmes, « moi née servante de la maison de Tillietudlem ! Il est certain qu’ils mentent, ceux qui osent avancer que Cuddie et moi nous ne sommes pas prêts à combattre, à répandre tout notre sang pour vous, madame, pour miss Édith et la vieille tour. J’aimerais mieux voir mon fils enterré sur l’heure, que de savoir qu’il n’ait pas satisfait aux devoirs et aux égards qui vous sont dus. Mais pour tout ce qui est de ces cavalcades et de ces revues, milady, il ne m’est pas possible de croire qu’il y ait quelque chose au monde qui les autorise. — Qui les autorise ! se récria la haute dame : avez-vous oublié, femme, qu’une humble vassale comme vous est liée à mes ordres ; que vous êtes tenue de m’obéir dans la maison, à la chasse, partout ; que vous êtes forcée de veiller pour moi, de me garder nuit et jour ? Vos services ne sont pas gratuits : n’avez-vous pas des terres ? n’êtes-vous pas des tenanciers doucement traités ? n’avez-vous pas une chaumière, un petit jardin potager, et la faculté de laisser paître une vache sur les landes ? Combien peuvent se flatter d’une telle faveur ? Et vous m’enviez votre fils ! Pour un seul jour qu’il pourrait m’être utile sous les armes, vous me le refusez ! — Non, milady ! non, milady ! ce n’est pas cela, » s’écria Mause fort embarrassée ; « mais on ne peut servir deux maîtres ; et, s’il faut dire la