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vous expose à une mort certaine. Mais la vengeance des lois tombera sur moi et non sur mon oncle ; il en doit être ainsi. Suivez-moi. »

Burley, qui avait attendu sa résolution avec un calme impassible, le suivit en silence.

La maison de Milnwood, bâtie par le père de celui qui en était propriétaire à l’époque dont nous parlons, pouvait passer pour un manoir assez remarquable, proportionné à l’étendue des domaines qui l’entouraient ; mais le nouveau propriétaire avait donné peu de soin aux bâtiments, qui réclamaient alors quelques réparations. À une portée de fusil de la maison se trouvaient les écuries ; ce fut en ce lieu que Morton s’arrêta.

« Il faut que je vous laisse ici un moment, lui dit-il tout bas, jusqu’à ce que j’aie pu trouver un lit pour vous dans la maison. — Je me soucie fort peu d’un lit, dit Burley ; pendant trente ans cette tête a reposé plus souvent sur le gazon ou sur la pierre que sur la laine ou le duvet. Un pot de bière, un morceau de pain, de la paille fraîche pour m’étendre quand j’ai dit mes prières, ont autant de prix à mes yeux qu’un appartement magnifique et la table d’un prince. »

Morton réfléchit alors que s’il tentait d’introduire le fugitif dans l’intérieur de la maison, ce serait l’exposer bien davantage au danger d’être découvert. S’étant en conséquence procuré de la lumière avec les ustensiles laissés sur la table à cet effet, et ayant attaché les chevaux, il assigna à Burley, pour lieu de repos, un lit en bois placé dans un grenier à demi rempli de foin ; ce lit avait été occupé par un domestique jusqu’au jour où il avait été congédié par le vieux Milnwood, dans un de ses accès d’avarice, qui devenait plus prononcée chez lui de jour en jour. Morton laissa son compagnon dans ce grenier, lui recommandant d’éteindre sa lumière, afin qu’aucune lueur ne fût aperçue de la fenêtre ; il lui fit en outre la promesse de revenir bientôt avec les provisions qu’il pourrait trouver à une pareille heure. Cependant cette promesse, il craignait bien de ne pouvoir la tenir, car la faculté d’obtenir les provisions même les plus ordinaires était entièrement subordonnée à l’humeur dont pouvait être affectée la seule confidente de son oncle, la vieille ménagère. S’il arrivait qu’elle fût au lit, ce qui était probable, ou de mauvaise humeur, ce qui ne l’était pas moins, Morton courait grand risque de ne rien obtenir.

Maudissant du fond de son cœur la sordide parcimonie qui se