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ments, répondit l’étranger ; mais cela se dissipera bientôt. — Je puis vous assurer, monsieur, que nous vous donnerons un assez bon souper, ajouta Cuddie ; quant au lit, nous ferons pour le mieux. Nous ne voudrions pas qu’un étranger manquât chez nous de ce qu’il est en notre pouvoir de lui offrir : mais nous sommes à court de lits. Jenny a tant d’enfants (Dieu bénisse elle et eux !) que je compte parler à lord Evandale pour qu’il nous donne… — Je ne serai pas difficile à contenter, » dit l’étranger en entrant dans la maison. — « Et soyez sûr qu’on aura bien soin de votre cheval, ajouta Cuddie ; je m’entends à soigner un cheval, et celui-ci est une belle monture. »

Cuddie conduisit le cheval à la petite étable, et dit à sa femme de tout préparer pour bien recevoir l’étranger. Celui-ci entra et s’assit à quelque distance du feu, tournant le dos à la petite fenêtre garnie d’un treillage qui éclairait la chambre. Jenny, ou mistress Headrigg, s’il plaît mieux au lecteur, l’engagea à quitter son manteau, son ceinturon et son chapeau à bords rabattus ; mais il s’en excusa, sous prétexte qu’il avait froid ; et, pour employer le temps jusqu’au retour de Cuddie, il entra en conversation avec les enfants, évitant avec soin les regards curieux de son hôtesse.






CHAPITRE XXXVIII.

l’apparition.


Que de larmes cruelles obscurcissent nos yeux ! que de morts nous souffrons avant la dernière ! Nous pleurons nos amitiés rompues, et les amours de notre jeunesse, qui ne sont plus.
Logan.


Cuddie ne tarda pas à revenir. Il assura à l’étranger, d’un air de satisfaction, que le cheval souperait bien, et que la ménagère lui ferait à la ferme un lit meilleur et plus convenable que celui que des pauvres gens comme eux auraient à lui donner.

« La famille est-elle à la maison ? » demanda l’étranger d’une voix tremblante et entrecoupée. — Non, monsieur ; ils sont absents avec leurs domestiques ; il n’en ont plus que deux maintenant ; et ma femme a les clefs, afin de prendre soin de tout pendant leur absence, quoiqu’elle ne soit pas précisément à leur service. Elle est née et a été élevée dans la famille, et elle en a la confiance. S’ils étaient ici, nous ne prendrions point une telle li-