Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/345

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il entama la conversation d’usage : « Que me demandez-vous, monsieur ? — Je voudrais vous faire quelques questions sur ce pays, répliqua l’étranger ; et l’on m’a adressé à vous, comme à un homme intelligent et en état de me répondre. — Sans doute, monsieur, » reprit Cuddie après un moment d’hésitation. « Mais, avant tout, je voudrais savoir de quelle espèce de questions il s’agit. On m’a fait tant de questions dans ma vie, et de tant de façons différentes, que, si vous les connaissiez, vous ne seriez pas surpris de ma méfiance. Ma mère me fit d’abord apprendre le simple catéchisme, ce qui était un terrible ennui ; ensuite j’eus l’avantage d’étudier sous mes parrain et marraine, pour faire plaisir à la vieille dame notre maîtresse ; et cependant je ne sus plaire à aucun d’eux. Quand je fus devenu homme, vint un autre mode de questions que j’aimais moins encore que l’appel efficace, et le « Je promets et fais vœu… » toutes questions quelquefois suivies de coups. Vous voyez donc, monsieur, que j’ai quelques raisons d’aimer à entendre une question avant d’y répondre. — Vous n’avez rien à redouter des miennes, mon bon ami ; elles sont seulement relatives à l’état de ce pays. — Le pays ? le pays va assez bien : si ce n’est que ce diable de Claverhouse (ils l’appellent maintenant Dundee) se remue encore dans les hautes terres, avec tous les Donald, les Duncan et les Dugal qui aient jamais porté les culottes sans fonds ; il veut les emmener avec lui pour bouleverser encore les affaires, après que nous les avons raisonnablement bien arrangées. Mais Mackay nous en délivrera, comptez-y bien. Il lui donnera son compte ; je vous en réponds. — Qui vous le garantit, mon ami ? — J’ai entendu faire cette prédiction, de mes propres oreilles, par un homme qui était mort depuis trois heures, et qui ressuscita uniquement dans le but de lui dire sa façon de penser. C’était à un endroit qu’on nomme Drumshinnel. — En vérité ? Je puis à peine vous croire. — Vous pourriez le demander à ma mère, si elle était en vie ; c’est elle qui m’expliqua ce prétendu mystère : car pour moi, je pense que cet homme était blessé. Il parla bien clairement de l’expulsion des Stuarts, qu’il désigna par leur nom, et du châtiment réservé à Claverhouse et à ses dragons. Cet homme se nommait Habakkuk Mucklewrath : sa cervelle était un peu en désordre, mais il n’en était pas moins un fameux prédicateur. — Il me semble que vous vivez dans un pays riche et paisible ? — Nous n’avons pas à nous plaindre, monsieur, et nous récoltons