Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/306

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par l’ennemi, et Burley, avec ce qui lui restait encore de soldats, se repliait sur le gros de l’armée, à qui le spectacle de leur retraite précipitée, ou plutôt de leur déroute, n’était guère propre à rendre le courage dont elle manquait.

Cependant les troupes royales traversaient le pont librement, et, maîtresses du passage, se formaient en ligne de bataille. Claverhouse, tel qu’un faucon perché sur un roc, et qui épie le moment de fondre sur sa proie, avait attendu sur la rive opposée le moment d’agir : il passe le pont à la tête de la cavalerie, au grand trot, puis la conduit par escadrons dans les intervalles et le long des flancs de l’infanterie, la forme en ligne sur la plaine, et la mène à la charge, dirigeant un corps nombreux sur le front des presbytériens, tandis que deux autres corps menacent leurs flancs. Cette malheureuse armée était alors dans cette situation où la simple démonstration d’une attaque suffit pour inspirer une terreur panique ; leurs esprits troublés par l’épouvante, leur courage abattu, les rendaient incapables de soutenir une charge de cavalerie, accompagnée de tout ce qui peut effrayer les yeux et les oreilles : l’impétuosité des chevaux, le retentissement de la terre sous leurs pas, l’éclat des épées, les ondulations des plumets, les féroces clameurs des cavaliers. Le premier rang fit à peine une décharge de mousqueterie mal dirigée et en désordre ; les derniers rangs étaient rompus et fuyaient déjà au hasard, avant l’arrivée de l’ennemi : en moins de cinq minutes, les cavaliers couraient parmi eux, frappant et tuant sans merci. La voix de Claverhouse se faisait entendre, même au-dessus de cet affreux tumulte : « Tue ! tue ! point de quartier ! criait-il à ses soldats, souvenez-vous de Richard Graham. » Les dragons, qui pour la plupart avaient partagé la défaite de Loudon-Hill, n’avaient pas besoin d’être excités à une vengeance aussi facile que complète. Leurs épées se rassasièrent de carnage, au milieu de fugitifs sans défense : si ces derniers demandaient grâce, ils n’obtenaient pour réponse que les cris de joie dont les vainqueurs accompagnaient leurs coups. Enfin, on ne voyait que des insurgés fuyant de toutes parts, poursuivis ou massacrés.

Un corps d’environ douze cents insurgés, qui s’était tenu un peu à l’écart et hors de la portée de la cavalerie, déposa les armes et se rendit à discrétion à l’approche de Montmouth et de son infanterie. Ce généreux seigneur leur accorda quartier sur-le-champ ; puis, parcourant au galop le champ de bataille, il se donna autant