Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/271

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majorité toute puissante dans le conseil, afin de faire sanctionner par elle tous les actes de cruauté qu’il lui plaira de commettre, et étouffer toute opposition par l’autorité du nombre. Il n’y a donc pas de temps à perdre, ou je ne retrouverai plus l’occasion. »

En entrant dans le misérable réduit, Morton trouva lord Evandale chargé de fers, couché sur un lit de bourre : il était endormi, ou plutôt plongé dans de profondes méditations. Evandale, entendant le bruit de ses pas, se leva et se tourna vers lui ; son visage était tellement abattu par la perte de son sang, le défaut de sommeil, le manque de nourriture, que personne n’aurait reconnu en lui le brillant militaire qui s’était si vaillamment conduit à l’affaire de Loudon-Hill. Il parut surpris de cette visite inattendue.

« Je suis désolé de vous voir ainsi, milord, lui dit Henri. — J’ai entendu dire, monsieur Morton, répliqua le prisonnier, que vous êtes un admirateur de la poésie ; en ce cas, vous vous rappelez peut-être ces vers :


Des murs sont-ils une prison ;
De pesants barreaux une cage ?
Aux yeux d’une mâle raison
Ce n’est souvent qu’un ermitage.


Mais quand ma captivité serait moins supportable, je dois m’attendre à en être pour toujours délivré demain. — Par la mort ! demanda Morton. — Sans doute, répliqua lord Evandale ; je n’ai pas d’autre perspective. Votre camarade Burley a déjà trempé ses mains dans le sang d’hommes que la bassesse de leur rang et l’obscurité de leur extraction auraient pu sauver. Moi qui n’ai pas la même protection contre sa vengeance, j’en dois attendre les plus terribles effets. — Mais, dit Morton, le major Bellenden peut rendre le château pour vous sauver la vie. — Jamais, tant qu’il aura un homme pour défendre les murs, et que cet homme aura un morceau de pain à manger. Je connais sa généreuse résolution, et je serais fâché qu’il en changeât à cause de moi. »

Morton se hâta de l’informer de l’insubordination des dragons, de leur projet de livrer le château, les dames et le major. Lord Evandale parut d’abord pouvoir à peine croire cette nouvelle ; revenu de sa surprise, il témoigna une vive affliction.

« Que faire ? dit-il, comment prévenir ce malheur ? — Écoutez-moi, milord, répondit Morton : je crois que vous ne refuseriez pas de porter le rameau d’olivier entre le roi votre maître et