Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/265

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Balfour, tu combattais dans les rangs des incirconcis, comme un Philistin au front farouche et à la main sanglante… Qui suis-je, as-tu demandé ? — Je vais te le dire, répliqua Burley, puisque tu as si grande envie de le savoir : tu es un de ceux qui veulent recueillir sans avoir semé, et partager le butin sans avoir pris part au combat… Tu es un de ceux qui suivent l’Évangile pour avoir leur part des pains et des poissons… qui aiment mieux leur presbytère que l’Église de Dieu, et qui recevraient le salaire d’un évêque ou d’un païen, plutôt que d’imiter le généreux exemple de ceux qui ont renoncé à tout pour servir la cause du Covenant.

— Et moi, je te dirai, John Balfour, » répliqua Poundtext justement irrité, « je te dirai qui tu es : tu es de ceux dont les fureurs sanguinaires et impitoyables font la honte de l’Église souffrante de ce royaume un de ceux qui par leurs violences et leurs atrocités peuvent faire craindre que la Providence ne couronne jamais du succès désiré la noble entreprise formée par nous pour reconquérir nos droits civils et religieux. — Messieurs, dit Morton, cessez ces récriminations qui ne peuvent que vous irriter de plus en plus ; et vous, monsieur Balfour, dites-nous si votre intention est de vous opposer à la mise en liberté de lord Evandale, quand cette mesure nous paraît utile dans l’état présent des affaires ? — Vous êtes ici deux contre un, répondit Burley ; mais vous consentirez, j’espère, à attendre la décision de tout le conseil à ce sujet. — Oui sans doute, répliqua Morton, pourvu que nous puissions nous fier à celui qui tient entre ses mains le prisonnier. Mais vous savez, » ajouta-t-il en jetant un regard sévère sur Burley, « que vous m’avez déjà trompé dans cette affaire. — Va, dit Burley avec dédain, « tu n’es qu’un jeune et pauvre écervelé qui, pour les noirs sourcils d’une sotte fille, trahirais ta foi, ton honneur, la cause de ton Dieu et celle de ton pays. — Monsieur Balfour, » dit Morton en mettant la main à son épée, « ces paroles demandent satisfaction. — Et tu l’auras, jeune homme, quand et où tu voudras, répondit Burley ; je m’y engage par serment. »

Poundtext intervint à son tour, leur montra les conséquences fâcheuses d’une querelle, et obtint à grand’peine une espèce de réconciliation forcée.

« Quant au prisonnier, dit Burley, disposez de lui comme bon vous semble. Je me lave les mains de tout ce qui peut en arriver. Je l’ai fait prisonnier à la pointe de mon épée et de ma lance, pendant que vous, M. Morton, vous passiez votre temps à surveiller