Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/262

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merce, et battaient la campagne achetant et vendant tout ce qu’ils trouvaient, comme des bergers de l’ouest[1]. En vérité, le major Bellenden n’avait que la plus petite part de tout ce qu’on prenait en son nom. — Alors, dit vivement Morton, la garnison doit avoir bien peu de vivres. — Ma foi ! oui, répliqua Ailie ; on n’en peut douter. »

Un trait de lumière brilla dans l’esprit de Morton.

« Burley m’a trompé, » pensa-t-il en lui-même, « ses saints principes lui permettent la ruse aussi bien que la cruauté… Mistress Wilson, dit-il, je ne puis m’arrêter ; il faut que je reparte sur-le-champ. — Oh ! prenez au moins le temps de manger, » répliqua d’une voix suppliante la bonne ménagère ; « je vais vous préparer quelque chose, comme je le faisais avant ces mauvais jours. — C’est impossible, dit Morton. Cuddie, apprêtez nos chevaux. — Ils mangent encore leur avoine, répondit l’écuyer. — Cuddie ! s’écria Alison ; qu’avez-vous besoin de mener avec vous ce porte-malheur, ce misérable drôle ? C’est lui et sa mendiante de mère qui ont causé tous les maux qui sont arrivés dans cette maison. — Paix ! paix ! reprit Cuddie ; il faut oublier et pardonner, madame. Ma mère est à Glasgow avec sa sœur, et ne pourra plus vous faire de mal. Pour moi, je suis le domestique du capitaine, et je le tiens plus propre, habits et personne, que vous ne l’avez jamais fait : l’avez-vous jamais vu mieux équipé ? — Non, en vérité ! » dit la vieille ménagère en regardant avec complaisance son jeune maître, qui semblait avoir encore meilleure mine sous son uniforme ; « vous n’avez jamais eu, j’en suis sûre, une cravate brodée comme celle-là, tant que vous êtes resté à Milnwood. Je ne vous la connaissais pas. — Non, non, madame, répliqua Cuddie ; elle est de ma façon. C’est une pièce de la garde-robe de lord Evandale. — De lord Evandale ! s’écria la vieille femme de charge ; de celui que les whigs doivent pendre demain matin, à ce que j’ai entendu dire ? — Les whigs pendre lord Evandale ! » s’écria Morton avec la plus grande surprise. — Oui, c’est chose certaine, dit la ménagère ; hier il fit une sortie, comme disent les soldats, pour recueillir quelques provisions, ses dragons furent mis en fuite et lui a été fait prisonnier. Le capitaine whig Balfour a commandé qu’on élevât une potence, et a juré (ou promis sur sa conscience, car un whig ne jure pas) que si demain au point du jour la garnison ne s’était pas rendue, il ferait pendre le jeune lord… aussi

  1. Voleur de bestiaux. a. m.