Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/243

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

eussent prévu les mauvaises intentions de John Gudyill à leur égard, abandonnèrent le poste avancé qu’ils avaient choisi, et rejoignirent le corps principal.

L’envoyé des covenantaires, à en juger par son air et ses manières, semblait abondamment pourvu de cet orgueil fanatique qui caractérisait sa secte. Son visage indiquait une satisfaction méprisante, et ses yeux à demi fermés semblaient dédaigner de se fixer sur des objets terrestres, tandis que, marchant d’un pas solennel, ses pieds paraissaient à chaque enjambée mépriser la terre qu’ils foulaient. Lord Evandale ne put retenir un sourire en voyant cette singulière figure.

« Avez-vous jamais vu pareil automate ? » dit-il au major Bellenden. « Quel ridicule ! on dirait qu’il se meut par un ressort. Croyez-vous qu’il puisse parler ? — Sans doute, dit le major, et je crois reconnaître une de mes vieilles connaissances, un vrai puritain, du vrai levain pharisaïque. Attendez, il tousse et crache, il va faire une sommation au château avec un bout de sermon, au lieu de s’annoncer par une fanfare. »

Le vieux soldat, qui dans son temps avait eu mainte occasion de se familiariser avec les manières de ces fanatiques, ne s’était pas beaucoup trompé dans sa conjecture ; seulement, au lieu d’un exorde en prose, le laird de Langeale (car ce n’était rien moins que ce grand personnage) récita d’une voix de Stentor un verset du psaume xxiv :

« Barrières luttant contre nous,
De vos vieux gonds arrachez-vous ;
Portes, qui devriez sans cesse
Rester fermes sur vos pivots,
Devant l’éternelle sagesse
Brisez vos solides barreaux. »

« Je m’en étais bien douté, » dit le major à Evandale ; et alors il se présenta à l’entrée de la barricade, demandant à l’envoyé dans quel but et pour quel motif, tel qu’un pourceau irrité par le vent, il poussait de si lugubres cris aux portes du château. — « Je viens, » répondit celui-ci à haute et intelligible voix, sans faire ni les salutations ni les cérémonies d’usage, « je viens au nom de la sainte armée de la ligue et du Covenant, parler aux deux fils de Bélial, William Maxwell dit lord Evandale, et Miles Bellenden de Charnwood. — Et qu’avez-vous à dire à Miles Bellenden et à lord Evandale ? répondit le major. — Est-ce à eux que je parle ? » dit le laird de Langeale d’un ton plein de suffisance. —