Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/213

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de temporiser avec le péché et l’infirmité est elle-même un écart de la bonne voie, et je crains bien que le ciel ne nous refuse l’honneur de continuer à travailler pour sa gloire, si nous recourons à des ruses mondaines et à un bras charnel. La fin sanctifiée doit s’opérer par des moyens sanctifiés. — Je te dis, reprit Balfour, que sur ce point ton zèle est trop sévère ; nous ne pouvons pas encore nous passer des secours des Laodicéens et des Erastiens ; il faut que nous endurions pendant un temps la tolérance au milieu de notre conseil. Les fils de Zerniah sont encore trop puissants pour nous. — Je te dis que cela me déplaît, dit Macbriar. Dieu peut opérer notre délivrance avec un petit nombre aussi bien qu’avec une multitude. L’armée des fidèles qui fut détruite à Pentland-Hill ne subit que la peine d’avoir reconnu l’intérêt charnel de ce tyran, de cet oppresseur, Charles Stuart. — Eh bien donc, dit Balfour, tu connais la résolution salutaire que le conseil a adoptée… de faire une déclaration étendue qui convienne aux consciences faibles de ceux qui ont accepté le joug de nos oppresseurs actuels : retourne au conseil, si tu veux, et fais-la retirer pour en obtenir une plus limitée. Mais ne reste pas ici pour m’empêcher de gagner ce jeune homme sur lequel mon âme gémit ; son nom seul en amènera des centaines sous nos bannières. — Fais donc comme tu voudras, dit Macbriar ; mais je ne t’aiderai pas à égarer ce jeune homme, et je n’entraînerai pas sa vie dans le danger, à moins que ce ne soit à des conditions qui puissent assurer sa récompense éternelle. »

L’artificieux Balfour congédia le prédicateur impatient, et retourna près de son prosélyte.

Afin de pouvoir nous dispenser de détailler au long les arguments par lesquels il pressa Morton de se joindre aux insurgés, nous saisirons cette occasion pour donner une esquisse du personnage qui les employait, et les motifs qui lui faisaient si vivement désirer de voir le jeune Morton embrasser la même cause que lui.

John Balfour de Kinloch, ou Burley, car on le désigne sous l’un et l’autre nom dans les histoires et les proclamations de cette époque malheureuse, était un gentilhomme aisé et de bonne famille du comté de Fife ; il avait été soldat dès son enfance, et, après une jeunesse orageuse, il avait de bonne heure renoncé à une vie de désordre pour embrasser les dogmes les plus sévères du calvinisme. Malheureusement, les habitudes d’intempérance