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et de livres, et vous insérez dans le post-scriptum la seule chose qui m’inquiète et m’intéresse. — Je ne savais pas, » dit Édith en hésitant beaucoup, « s’il serait tout à fait… tout à fait convenable que je… — Je sais ce que vous voulez dire… s’il serait convenable de prendre intérêt à un presbytérien. Mais j’ai beaucoup connu le père de ce jeune garçon. C’était un brave soldat, et s’il a fait mal une fois, il a fait bien dans d’autres circonstances. Je dois louer votre prudence, Édith, de n’avoir rien dit à votre grand-mère au sujet de l’affaire de ce jeune gentilhomme ; vous pouvez être sûre que je n’en dirai rien non plus… je saisirai une occasion pour parler à Claverhouse. Allons, mon enfant, ils vont déjeuner, suivons-les. »






CHAPITRE XII.

le déjeuner.


Sans doute ils ont mangé leur déjeuner chaud, c’est une coutume chez les voyageurs prudents.
Prior.


Le déjeuner de lady Marguerite Bellenden ne ressemblait pas plus à un déjeuner de nos jours que la grande salle en pierre de Tillietudlem ne ressemblait à un salon moderne. Pas de thé, pas de café, nulle variété dans la pâtisserie ; mais des viandes solides et substantielles, le jambon sacerdotal, le chevaleresque aloyau, le noble baron de bœuf, le royal pâté de gibier[1]. On voyait figurer sur les tables des flacons d’argent, sauvés avec peine des griffes des covenantaires, et remplis alors les uns d’ale, les autres d’hydromel, et quelques-uns d’un vin généreux de diverses qualités. L’appétit des hôtes répondait à la solidité et à la magnificence des préparatifs. Pas de mots inutiles, nul badinage, mais cet exercice ferme et persévérant de la mâchoire, apprécié seulement par ceux qui se lèvent tôt et se livrent à des occupations plus fatigantes que de coutume.

Lady Marguerite voyait avec plaisir que les provisions qu’elle avait préparées diminuaient sensiblement ; elle ne trouvait guère l’occasion d’user envers quelque convive, sinon envers Claverhouse, de l’invitation pressante de manger, exercice auquel les

  1. On sait que les Anglais se complaisent dans ces sortes de personnifications gastronomiques. a. m.