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mais homme ni cheval plus pesamment chargés ne luttèrent dans les ombres de la nuit contre le cours rapide d’un torrent. L’onde, volant en écume, jaillit jusque sur le panache du guerrier : néanmoins, grâce à son courage et à la protection de la Vierge, il atteignit à la fin la rive opposée.

XXX.

Le chevalier gagna alors Bowden-Moor, et secoua tristement la tête en jetant un regard sur les hauteurs d’Halidon ; car à l’instant s’offrit à sa pensée le carnage21 sanglant de cette funeste journée où naquit la haine invétérée des Scott et des Car ; où, sous les yeux du roi Jacques, qui devait être la proie du vainqueur, Home et Douglas, combattant au premier rang, firent reculer le clan de Buccleuch jusqu’à ce qu’Elliot, dirigeant sa lance contre la poitrine du brave Cenford, la retirât fumante du sang de son noble adversaire.

XXXI.

Il pressa avec humeur les flancs de son coursier, et eut bientôt dépassé l’odieuse colline. Au dessous, sur les bords riants de la Tweed, apparaissait dans sa pâle splendeur l’antique Melrose22. Les murs couverts de lichens de la sombre abbaye se montraient dans l’ombre comme un immense rocher noir. Lorsqu’il avait passé près d’Hawick, le couvre-feu était sonné ; maintenant on chantait laudes au milieu de la nuit, dans l’église de Melrose. Les chants, portés sur l’aile capricieuse de la brise, s’élevaient ou s’abaissaient majestueusement, comme les accords irréguliers de cette harpe, dont les cordes magiques s’animent frappées par le seul souffle des vents. Mais, lorsqu’il arriva dans Melrose, tout était rentré dans le silence ; il établit convenablement son coursier dans une écurie, et se dirigea vers les murs solitaires du couvent.