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table, et jettent l’épouvante parmi les faibles mortels, quand le roi des dieux leur prépare l’horrible mort et les maladies, ou qu’il menace de la guerre les cités coupables. Jupiter envoie du haut des airs un de ces monstres agiles, et lui ordonne de se présenter à Juturne comme un présage. La furie part et se précipite sur la terre en tourbillon impétueux. Telle, chassée violemment par la corde qui la pousse, vole, inaperçue à travers les ombres, la flèche que le Parthe ou le Crétois ont armée de sucs empoisonnés, et qui porte avec elle une mort inévitable : telle fond sur la terre la fille de la Nuit.

Dès qu’elle a touché le sol occupé par les deux armées, elle se renferme tout entière sous la forme de ce petit oiseau qui, perché la nuit sur les tombeaux ou sur les toits déserts, attriste longtemps les ténèbres de son chant lugubre. Sous cette forme, elle passe et repasse devant Turnus en poussant un cri, et frappe de l’aile son bouclier. Une étrange torpeur, causée par l’effroi, engourdit les membres de Turnus ; ses cheveux se dressent d’horreur, et sa voix s’arrête au passage. Au bruit aigu de son vol sinistre, la malheureuse Juturne a reconnu de loin le monstre infernal : dans son désespoir elle arrache ses cheveux, meurtrit son sein et se déchire le visage. « Ô Turnus, que peut maintenant ta