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En ce moment, un espoir joyeux vient animer Sergeste et Mnesthée, qui, restés les derniers, se flattent de dépasser Gyas retardé dans sa course. Sergeste s’avance le premier, et approche du rocher : mais son navire tout entier ne dépasse pas encore celui de son rival. Une partie seule est en avant, et la proue de la Baleine serre les flancs du Centaure. Cependant Mnesthée, parcourant à grands pas son navire, excite ses rameurs : « Appuyez, appuyez fortement sur les rames, dignes compagnons d’Hector, que j’ai choisis pour les miens depuis le dernier jour de Troie ! Maintenant déployez cette même vigueur et ce courage éclatant qui vous firent dompter les Syrtes de Gétulie, et les flots de la mer Ionienne, et les rapides courants de Malée ! Ce n’est plus au premier rang qu’aspire Mnesthée ; et ce n’est plus pour vaincre que je combats… Si pourtant !… mais qu’ils l’emportent, ô Neptune, ceux à qui tu as donné la victoire ! quant à nous, évitons la honte d’arriver les derniers ! et que notre victoire soit d’éviter cet opprobre. » Il dit, et tous ensemble, les matelots se courbent sur les rames. Sous les vastes coups des rameurs la poupe d’airain tremble, et l’onde s’ouvre en fuyant ; leur souffle haletant bat leurs flancs qui palpitent, et la sueur ruisselle de leurs corps. Le hasard leur donne l’avantage désiré : tandis qu’emporté par son ardeur, Sergeste dirige sa proue trop près