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demeure, qu’Éole se pavane dans ce palais, et qu’il règne dans la prison où les vents doivent être enfermés. »

Il dit, et soudain il abaisse et calme les flots enflés, chasse les nues amoncelées, ramène le soleil ; et tandis qu’unissant leurs efforts, Cymothoé et Triton dégagent les navires suspendus aux pointes des rochers, lui-même il les soulève de son trident, ouvre les vastes syrtes, aplanit les ondes, et des roues légères de son char effleure la surface des mers. Ainsi, quand la sédition s’élève dans une grande cité, et qu’une vile multitude se livre à son emportement, les brandons et les pierres volent de toutes parts, et la fureur arme tous les bras. Mais qu’en ce moment paraisse un homme respectable par sa piété et par les services rendus à sa patrie, tout se tait ; la foule s’empresse pour l’entendre ; toutes les oreilles sont attentives : il parle, et sa parole gouverne les esprits et soumet les cœurs. Ainsi tombe tout le bruit des vagues, dès que le dieu jette un regard sur la mer, et que, sous un ciel devenu serein, il presse ses coursiers et fait voler son char sur la plaine liquide. Les Troyens fatigués s’efforcent de gagner le prochain rivage, et se dirigent vers les bords de la Libye. Là, dans une baie profonde, est une île dont les flancs sont disposés de manière à former un port. Les flots viennent de la haute mer s’y briser, et se divisent ensuite en se