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ET MAXIMES.

807.  L’esprit a besoin d’être occupé ; et c’est une raison de parler beaucoup, que de penser peu.

808.  Quand on ne sait pas s’entretenir et s’amuser soi-même, on veut entretenir et amuser les autres.

809.  Vous trouverez fort peu de paresseux que l’oisiveté n’incommode ; et, si vous entrez dans un café, vous verrez qu’on y joue aux dames.

810.  Les paresseux ont toujours envie de faire quelque chose.

811.  La raison ne doit pas régler, mais suppléer la vertu.

812.  Socrate savait beaucoup moins que Bayle et que F.[1] ; il y a peu de sciences utiles.

813.  Aidons-nous des mauvais motifs pour nous fortifier dans les bons desseins[2].

814.  Les conseils les plus faciles à pratiquer sont les plus utiles[3].

815.  Conseiller, c’est donner aux hommes des motifs d’agir qu’ils ignorent[3].

816.  Nous nous défions de la conduite des meilleurs esprits, et nous ne nous défions pas de nos conseils[4].

817. L’âge peut-il donner droit de gouverner la raison ?

818.  Nous croyons avoir droit de rendre un homme heureux à ses dépens, et nous ne voulons pas qu’il l’ait lui-même.

  1. Fontenelle. — G. — L’auteur veut dire que Socrate était plus sage, et Bayle plus savant. La vie de ces deux hommes a été si différente, qu’elle ne peut guère être mise en opposition, et il fallait un fait plus évident pour prouver qu’il y a peu de sciences utiles. Sans doute, celui qui n’est que savant, et qui reste enfermé dans son cabinet, sans instruire ses semblables par un ouvrage véritablement utile, ne vaut pas l’homme vertueux qui a lu peu de livres, mais qui a consacré sa vie à faire du bien à ses semblables. Si cette vérité est celle que l’auteur a voulu prouver par cette Maxime, elle n’avait besoin que d’être énoncée ; mais il semble que Vauvenargues avait une sorte d’animosité contre Bayle. — F. — Vauvenargues n’a pas plus d’animosité contre Bayle que contre Fontenelle ; mais il n’a jamais varié dans cette opinion que le bon sens vaut mieux que le savoir, de même que l’instinct, ou le sentiment, vaut mieux que la raison. Voltaire ne reprend rien à cette Maxime, quant au fond ; il remarque seulement qu’elle n’est pas bien écrite. — G.
  2. [Mauvais. — V.] — Rapprochez de la Maxime 157e ; voir aussi la 4e note de la page 53. — G.
  3. a et b [Commun, mauvais. — V.]
  4. [Obscur. — V.] — Voici, je crois, le sens de cette pensée, dont, en effet, l’expression n’est pas assez nette:Nous ne voulons nous laisser gouverner par personne, mais nous n’en voulons pas moins gouverner les autres. — G.