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ET MAXIMES.

ment, que vrai et pathétique dans les autres ; d’une vaste imagination, qui a embrassé et pénétré rapidement toute l’économie des choses humaines ; à qui ni les sciences abstraites, ni les arts, ni la politique, ni les mœurs des peuples, ni leurs opinions, ni leur histoire, ni leurs langues même, n’ont pu échapper ; illustre, en sortant de l’enfance, par la grandeur et par la force de sa poésie féconde en pensées, et, bientôt après, par les charmes et par le caractère original, plein de raison, et toujours concis, de sa prose ; philosophe et peintre sublime, qui a semé avec éclat ; dans ses écrits, tout ce qu’il y a de grand dans l’esprit des hommes ; qui a représenté les passions avec des traits de feu et de lumière, et les a fait parler sur nos théâtres avec autant de tendresse que de véhémence ; savant à imiter le caractère et à saisir l’esprit des bons ouvrages de chaque nation, par l’extrême étendue de son génie, mais n’imitant rien, d’ordinaire, qu’il ne l’embellisse ; éclatant jusque dans les fautes qu’on a cru remarquer dans ses écrits, et tel que, malgré des défauts inévitables avec des qualités si rares, et malgré les efforts de la critique, il a occupé sans relâche de ses veilles ses amis et ses ennemis, et porté chez les étrangers, dès sa jeunesse, la réputation de sa patrie et la gloire de nos lettres, dont il a reculé toutes les bornes.

266. Si on ne regarde que certains ouvrages des meilleurs auteurs, on sera tenté de les mépriser ; pour les apprécier avec justice, il faut tout lire.

267. Il ne faut point juger des hommes par ce qu’ils ignorent, mais par ce qu’ils savent, et par la manière dont ils le savent[1].


    osé se montrer sous tant de faces, on ait si peu de chose à lui reprocher. » — On devine aisément que l’original de ce brillant portrait, c’est Voltaire. Voir, page 262, le morceau qui le concerne. — G.

  1. [Apparemment. — V.] — Var. : « Il ne faut pas juger d’un homme par ce qu’il ignore, mais parce qu’il sait ; ce n’est rien d’ignorer beaucoup de choses, lorsqu’on est capable de les concevoir, et qu’il ne manque que de les avoir apprises. »