370 ESSAL « lez·vous vous réduire à les écrire? Si vous faites attention « aux hommages qu’on met aux pieds dlun homme que le « prince élève a unposte, croirez—vous qu’il y ait des «. louanges pour un écrivain, qui approchent de ces res- ` « pectsf Qui ne peut ni aider la vertu, ni punir le crime, « ni venger l'injure dumérite, ni confondre l'orgueil des « riches, autrement qu’en paroles, se contentera.·t—il d'un « peu d'estime? ll appartient à un artisan d’étre enivré de « régner au barreau, ou sur nos thütres, ou dans les écolœ « des philosophes; mais vous qui aspirez à la vraie gloire, « pouvez—vous larnettre a ce prix? Regardez de près, mes « amis : celui qui a gagné des batailles, qui a repoussé «‘l'ennemi des frontières qu’il ravageait, et donné aux « peuples, par ses victoires, Pespérance d’une paix glo- · « rieuse, s‘il.efface tout à. coup la réputation des ministres · et le faste des favoris, qui daignera encore jeter les yeux « sur vos poètes et vos philosophes? Mes amis, ce n’est « point par des paroles qu’on peut s’élever sur les ruines « de l‘orgueil des grands, et forcer Phommage du monde; « c'est par l'activité et l'audace, c'est par le sacrifice de la «· santé et des plaisirs, c'est par le mépris du danger, et ‘ · par les grandes actions que ces vertus produisent. Celui « .qui compte sa vie·pour quelque chose, ne doit pas pré- « tendre a la gloire; il n’est capable de rien de grand. » Ainsi parle un esprit chagrin, que la réputation des lettres ne peut satisfaire; il parait assez, par ses discours, qu’il lutte intérieurement avec violence contre les dégoûts et les humiliations de son métier, et il semble quelquefois que la médiocrité de son état l’irrite contre les riches et les puis- sauts: « Ce n’est rien encore, mes amis, reprend-il, de « soutfrir d‘extremes besoins, et d’étre privé des plaisirs; « mais quel est celui qui, étant pauvre, a évité le mé- ·· pris, n'a pas été opprimé par les puissants, moqué par « les faibles, fui et abandonné par tous les hommes? et « quel œt celui qui s'est sauvé, par les lettres, de ces hu- · mîliations? A-t·on pris garde à ses talents? a—t-on fait
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