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338 ESSAI et des partisans passionnés ; quelques-uns abandonnent leur province, dans la seule espérance de le retrouver, d’en étre · protégés dans la capitale, et ils ne sont pas trompés dans leur attente; Turnns les reçoit parmi ses amis, et il leur tient lieu de patrie. ll ne ressemble point à ces hommes qui, capables de quelques mouvements de générosité, et iu- dustrienx, par vanité, à se faire des créatures, les perdent par paresse ou par inconstance; qui, promettant toujours plus qu'ils ne tiennent, se font de secrets ennemis de ceux qui se sont trop flattés, offensent sans retour ceux qu'ils n'ont servis qu'à demi, et, croyant abuser tous les hommes, I n'abnsent qu'enx—mémes; Tumus ne se dégoûte point des gens de mérite qu'il a séduits par ses adresses, et, comme il ne recherche point les hommes sans dessein, il ne les ne- glige jamais par légèreté. Une âme si belle trouve un charme secret à satisfaire son génie bienfaisant et accessible; Tumus est bon et humain; son esprit flexible sait prendre des formes trompeuses, mais il est droit et sincère; il est moins touché de l'éclat de sa fortune que du juste ascendant que la nature donne aux grandes ames sur les cœurs, et il épure par la hauteur de ses sentiments la forte ambition dont il est épris'. Si cependant la fortune, qui peut tout contre la prudence, fait qu'il est prévenu dans ses desseins, il avoue la plupart des faits qu'on lui impute, et les justifie par les lois, ou par la force de son éloquence; ses juges sont éton- nés de sa sécurité, et attendris parses discours;. la cabale — qui le poursuit, et qui veut sa perte, n'ose le laisser re- paraltre, ni l’interroger en public. Quoiqu’il soit convaincu d'avoir attente contre la liberté, on est obligé de le faire mourir secrètement, et le peuple, qui l’adorait, demeure persuadé de son innocence ’.

  • Var. : · Tumus ne cultive les hommes que pour satisfaire son génie bien-

· faisant et accessible, pour les dominer par l'esprit, pour les surpasser en ·· vertu, pourjouir decet ascendant que la nature donne ala bontesurlea cœurs. «, « ll est amoureux de wo pire que l'on peut acquérir par la raison etpnr les ·· séductions de Véloquence; ses paroles sont plus aimables que en bienfaits · meme, et sa haute naissance moins considérée que sesqualités personnellem

  • ll est remarquable que ce morceau , celui de Lentulus qui précède, et