Page:Œuvres de Vauvenargues (1857).djvu/366

Cette page n’a pas encore été corrigée

3|2 ESSAI léger, vain et raîlleur; n’estime et n'épargne personne, change incessamment de discours, ne se laisse ni manier, ni user, ni approfondir, et fait plus de visites en un jour que Dumoulin' ou qu’un homme qui sollicite pour un grand procès. Ses plaisanteries sont amères; il loue rarement, et pousse l’insolence jusqu’a interrompre ceux qui sont assez complaisants pour le louer lui-méme; il les fixe, et détourne _la tète. Il est dur, avare, impérieux; il a de l'ambition par arrogance, et quelque crédit par audace. Les femmes le courent, il les joue; il ne connait pas l'amitié; il est tel que le plaisirmeme ne peut l’attendrir_un moment ’. 2l. — rnocas, ou LA Fausse singularité ’. Le faux me déplalt et me blesse, sous quelque figure qu’il se présente. Pendant que des hommes, complaisants par goût et avec dessein, embrassent sans choix les idées de tout le monde, qui croirait qu’on en trouvât d'autres, qui se piquent de ne penser en rien comme personne, et de n'en1- prunter de personne leurs opinions? Ne parlez jamais d’élo· quence à Phocas, ou, si vous voulez lui complaire, ne lui nommez pas Cicéron, il vous ferait d’abord l’é1oge d'Ab- dallah, d'Abutaleb et de Mahomet, et vous assurerait que ' ` • Dumoulin, dont le vrai nom est Malin (N.), célèbre médecin, mort A Paris, en 1755, A Page de 89 ans, sans postérité, et riche de aeise cent mille livres. — B. • Var.: [e Sa conversation œt un tissu de plaisanteries et d'épig·ram- ·· mes; il ne rit pas de ses bons mots, mais rit encore moins de ceux d'un ¤ autre; il dit, indifféremment et sans égards, du mal de tout le monde, et ne «· pense quelque bien que de lui-mème. Il entame A la fois mille sujeta, et ·· n’en suit aucun; quand il sent qu’il eat an bout de son esprit, il se hate de • quitter ceux qui pourraient a’en apercevoir, et transporte ailleurs son _ « mince bagage. Il n'a point d'a.mis dans le monde; il n’en a pas besoin, il ·· est lui-meme son propre flatteur, son admirateur, et son ami intime. Quoi- · qu’il soit bien traité de quelques femmes, il n'a jamais eu la faiblesse d‘en ·- aimer aucune. Il est dur, insolent, ivre de ses bonnes fortunes et de son ·« petit personnage. Il a de l'ambition par arrogance, ct quelque crédit par ~ audace; mais il est méprise ou haî de la plupart des hommes; car pour « rait-on s'at.tacher A celui que non-seulement l’amitié, mais l'amour meme « n'a jamais pu attendrirh ] ‘ ll y a, dans les manuscrits, sous le nom de Timuqèire, une autre version qui n'ust que le canevas de colle-t·l. j- G.