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IMITATION DE PASCAL.


passe la raison; mais quelle démonstration peut·on avoir sur des faits, et principalement sur des faits merveilleux, que l'esprit de parti peut avoir altérés ou supposés en tant de manières? Une ·seule démonstration, ajoutent-ils, doit prévaloir sur les plus fortes et les plus nombreuses appa- ` rences; ainsi la plus grande probabilité de nos miracles ne contre-balancerait pas une démonstration de la contradiction de nos mystères, supposé que l'on en eût une. ll est donc question de savoir qui a pour soi la démons- tration oa l’apparence. S’il n’y avait que des apparences dans les deux partis, des lors il n’y aurait plus de règle; car comment compter et peser toutœ ces probabilités? S'il yavait, au contraire, des démonstrations des deux cotés, on serait dans la mème peine, puisque alors la démonstration ne distinguerait plus la vérité. Ainsi la vraie religion n'est pas seulement obligée de se démontrer, mais il faut encore _ qu’elle fasse voir qu'il n’y a de démonstration que de son côté. Aussi le fait-elle, et ce n'est pas sa faute si les théo- logiens, qui ne sont pas tous éclairés, ne choisissent pas bien leurs preuves. nu sroïcisus sr ou cnaisrnnlsue. Les stoïciens n’étaient pas prudents, car ils promettaient le bonheur dès cette vie, dont nous connaissons tous par expérience les misères; leur propre conscience devait les accuser et les convaincre d’imposture. Ce qui distingue notre sainte religion de cette secte , c’est qu’en nous proposant, comme ces philosophes, des vertus surnaturelles, elle nous donne des secours surnaturels. Les libertins disent qu'ils _ ne croient pas à ces secours; et la preuve qu'îls donnent de leur fausseté, c’est qu'ils prétendent étre aussi honnêtes gens que les vrais dévots, et qu'à leur avis un Socrate, un Trajan et un Marc—Aurèle valaient bien un David et un Moïse; mais ces raisons-là sont si faibles, qu'elles ne mé- ritent pas qu'on les combatte. l