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SUR LE LIBRE ARBITRE.


leur salut? ll est mort pour tous, j’en conviens; c’est-L-dire que sa `mort les a tous rendus capables d’ètre lavés des souillures du péché originel , et d’aspirer au ciel, qpi leur · était fermé, grace qu’ils n’avaient point avant; mais de ce que tous sont rendus capables d’ètre sauvés , peut-on conclure que Dieu veut les sauver tous? Si vous le dites pour ne pas vous rendre, pour défendre votre opinion, voilà. en elïet une fuite; mais si c’est pour nous persuader, y parviendrez·vous parla, et osez·vous l’espérer? Pensez- vous qu’un Américain, d'un esprit simple et grossier, comme ` sont la plupart dœ hommes, qui ne connait pas Jésus- Christ, à. qui l`on n’en a jamais parlé, et qui meurt dans un culte impie, soutenu par l’exemple de ses ancêtres, et dé- fendu par tous ses docteurs; pensez-vous, dis-je, que Dien veuille aussi sauver cet homme, qu'il a si fort aveugle? pensez-vous au moins qu'on le croie sur votre simple aflir- mation, et vous-meme le croyez-vous? — Vous craignez, dîtes·vous, que ma doctrine ne tende à corrompre les hommes, et à les désespérer.—Pourquoi donc cela, je vous prie? qu`ai-je dit à cet effet? .l'enseigne, il est vrai, que les uns sont destinés à. jouir, et les autres à soul`- frir toute Féternite; c’est la créance inviolable de tous ceux qui sont dans l’Église, et j’avoue que c’est un mystère que nous ne comprenons pas. Mais voici ce que nous savons avec la derniere évidence; voici ce que Dieu nous apprend : ceux qui pratiqueront la loi sont destinés a jouir, ceux qui la transgresseront, à souffrir; il n’en faut pas savoir davantage pour conduire ses actions, et pour s` éloigner du mal. J’avoue que si cette notion ne se trouve pas suffisante, si elle ne nous entraine pas, c’est qu’elle trouve en nous des obstacles plus forts; mais il faut convenir aussi que, bien loin de nous pervertir, rien n’est plus capable, au contraire, de nous · convertir; et ceux qui s’abandonnent, dans la vue de leur sujétion, agissent contre les lumières de la plus. simple rai- son, quoique nécessairement. ll ne faut donc pas dire que notre doctrine soit plus dan-