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DE LOUIS XV.


<}u'il est aimable d’étre encore , sur le trône , homme <:omme nous, et qu’il est admirable de savoir étre homme, sans cesser pourtant d'ètrs roi l Peuples, je pourrais vous parler de la prospérité de tant d'années coulées dans le repos et l’abondance par ses soins: mais, touché d’tme autre pensée dans l'état présent des af- faires, et aprés avoir vu moi-méme vos plus justes espé- rances renversées, vos conquétes abandonnées, la gloire de notre nation flétrie, et la mort irritée, au milieu de nos camps, menaçant nos armées d'ime entière ruine; dans le deuil de tant de familles et l'accableme¤t des impots, suite déplorable de la guerre, je ne vous ferai pas un tableau fastueux de nos avantages passés, les dettes acquittées, les services payés, l' ordre rétabli sans violence, un État fameux dans l'E1u·ope, l'ancien héritage de notre ennemi, réuni aprés tant de siècles et par un traité solennel, fruit de deux glorieuses campagnes, au trône dont il émanait', et, pour dire tout en un mot, la France dans un tel degré de répu- tation et de puissance, qu'à cet événement fatal, le triste signal de la guerre qui désole tant de royaumes, nous avons vu le Roi porter ses armes redoutées jusqu’à l'orient de l' Eu- rope, disposer de l’Empire et du sceptre de Bohème, sans qu'aucnne nation ait osé ouvertement se déclarer, sans qu'aucnne encore, aujourd*hui qu’il a rappelé ses armées, puisse se rasseoir dans ses craintes. Hélas ! c’était la paix qui nous avait donné la plupart de ces avantages, la paix qui faisait fleurir toutes les vertus civiles, mais qui laissait éteindre tous les grands talents , la sagesse ,. la prospé- rité, l'autorité du Roi paraissant les rendre inutiles; la paix, dis·je, qui nous reproche et l'énervement des courages et la corruption des esprits, et que, pour ces raisons, je ne veux plus louer'. Mais nous devons du moins cette justice au

  • Par le traité de Vienne, qui fut arreté dès 1735, mais ne fut signé qu‘en

1138. Punpereur Charles VI cédait L Stanislas Leczinski la Lorraine, qui devait, apres la mort de ce prince, revenir irrévocablement A la France. ——G.

  • Vauvenargues n’aime pas la paix. ll dira dans ses Maximes: ·¤ La paix

- rend les peuples plus heureux et les hommes plus faibles. -— La paix, qui