S’il est une classe d’écrivains dont nous aimions à connaître la vie et le caractère, c’est celle des écrivains moralistes. Le droit qu’ils prennent de nous juger nous donne le désir de les juger à leur tour, et de voir s’ils ont été aussi exigeants pour eux-mêmes qu’ils le sont pour nous d’ordinaire. Quand ils viennent nous dire ce que nous devons être, nous voulons savoir ce qu’ils ont été, et il est rare que cette curiosité, après tout légitime, ne soit pas satisfaite. En effet, si désintéressé qu’il paraisse de son travail, le moraliste y met de lui toujours plus qu’il ne sait ou qu’il n’e veut y mettre, et, alors même qu’il prétend n’étudier que les autres, par les choses qu’il approuve ou qu’il reprend en eux, par les règles de conduite qu’il propose ou qu’il condamne, il nous permet de soupçonner au moins son caractère dans son œuvre, et de surprendre l’homme sous l’écrivain. Cependant, certaines conditions de réserve et de prudence sont, dans ce cas, nécessaires ; car tel moraliste vaut mieux, et tel vaut moins que son livre ; tel autre semble craindre de se produire, et demeure dans l’ombre de son tableau : Pascal, avant que de savantes et