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SUR DIVERS SUJETS.


être reçu agréablement dans ïcsprit humain; un homme qui écrirait sur ce principe n'écrirait que pour les sots, et serait bientot méprise des bons esprits. Les fables ont été inventées pour faire recevoir la vérité aux enfants, ou aux esprits faibles qui ne sortent pas de l'enfance; mais rien n’est si rebutant pour des hommes rai- sonnables, et il n'y a que les agréments du style, le charme des vers, la beauté et la vérité des maximes que ces fables enveloppent, qui puissent en faire supporterla puérilité. Dire donc que les fables plaisent aux hommes, c'est dire que la plupart des hommes sont enfants, qu’ils se laissent surpren- dre au merveilleux, que peu de chose éblouit leur jugement, et tire leur esprit de son assiette; c'est dire que peu de gens ont assez de sagacité pour distinguer le vrai du faux ; mais . dans les choses où le vraiest connu, le faux se présente in- utilement, et, plus il est orné, plus il est ennuyeux.] lt6. — sua Lx-as Anciens nr Les uonnauas. Un Athénien pouvait parler avec véhémence de la gloire à des Athéniens; un Français a des Français, nullement; il serait honni'. L'imitation des anciens est fort trompeuse: telle hardiesse qu'on admire avec raison dans Démosthènes, passerait pour déclamation dans notre bouche. J’en suis fort fâché, nous sommes un peu trop philosophes; à force d’av0ir ouî dire que tout était petit ou incertain parmi les hommes, nous croyons qu'il est ridicule de parler affirma- tivement et avec chaleur de quoi que ce soit. Cela a banni l'éloquence des écrits modernes; car l'unique objet de l’é- loquence est de persuader et de convaincre; or, on ne va point à. ce but quand on ne parle pas très-sérieusement. Celui qui est de sang-froid n'échauii`e pas, celui qui doute ne persuade pas; rien n'est plus sensible. Mais la maladie de nos jours est de vouloir badiner de tout; on ne soutïre qu'à peine un autre ton. l Voir, plus loin, la tln du 2* Dùceurt sur la Gloire - G. ,