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la ressource des hommes superficiels qui craignent d’être approfondis ; il faut leur laisser ces misères, dont ils ont besoin avec leur mérite spécieux[1].

Mais c’est trop s’arrêter aux choses ; tâchons d’abréger ces principes par de courtes définitions.

Le désir est une espèce de mésaise que le goût du bien met en nous, et l’inquiétude un désir sans objet.

L’ennui vient du sentiment de notre vide ; la paresse naît d’impuissance ; la langueur est un témoignage de notre faiblesse, et la tristesse, de notre misère.

L’espérance est le sentiment d’un bien prochain, et la reconnaissance, celui d’un bienfait[2].

Le regret consiste dans le sentiment de quelque perte ; le repentir, dans celui d’une faute ; le remords, dans celui d’un crime et la crainte du châtiment[3].

La timidité peut être la crainte du blâme, la honte en est la conviction.

La raillerie naît d’un mépris content[4].

La surprise est un ébranlement soudain à la vue d’une nouveauté ; l’étonnement est une surprise longue[5] et

  1. Bien. — V.] — Vauvenargues reviendra souvent sur ces idées ; voyez notamment le 8e Conseil à un jeune homme, et toutes les maximes sur la finesse et sur l’habileté. — G.
  2. [Trop commun. — V.]
  3. Ici Voltaire écrit à la marge Girard, faisant allusion, sans doute à l’auteur des Synonymes. — G. — Ce n’est pas à ce qu’il semble, la différence de la faute et du crime, qui constitue celle du repentir et du remords. On peut expier ses crimes par le repentir, et sentir le remords d’une faute. Si le repentir est moins cruel, c’est qu’il suppose le retour, et une résolution de ne plus retomber, qui console toujours. Le remords peut exister avec la résolution de se rendre encore coupable. Heureux, si je puis, dit Mathan dans Athalie,

    À force d’attentats, perdre tous mes remords.

    C’est ainsi que les scélérats les perdent ; il n’y a point pour eux de repentir,

    Dieu fit du repentir la vertu des mortels.

    Heureusement le remords peut naître sans la crainte du châtiment ; mais ce n’est guère que pour les premiers crimes. — S.

  4. [Bien. — V.]
  5. [Pourquoi longue ? V.]