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II

LACENAIRE


Pour contraste, la main coupée
De Lacenaire l’assassin,
Dans des baumes puissants trempée,
Posait auprès, sur un coussin.

Curiosité dépravée !
J’ai touché, malgré mes dégoûts,
Du supplice encor mal lavée,
Cette chair froide au duvet roux.

Momifiée et toute jaune
Comme la main d’un Pharaon,
Elle allonge ses doigts de faune
Crispés par la tentation.

Un prurit d’or et de chair vive
Semble titiller de ses doigts
L’immobilité convulsive,
Et les tordre comme autrefois.

Tous les vices avec leurs griffes
Ont, dans les plis de cette peau,
Tracé d’affreux hiéroglyphes,
Lus couramment par le bourreau.