Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 3, Lemerre, 1890.djvu/122

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Dans son pourpoint de satin rose,
Qu’un goût hardi coloria,
Il semble chercher une pose
Pour Boulanger ou Devéria ;

Terreur du bourgeois glabre et chauve,
Une chevelure à tous crins
De roi franc ou de lion fauve
Roule en torrent jusqu’à ses reins.

Tel, romantique opiniâtre,
Soldat de l’art qui lutte encor,
Il se ruait vers le théâtre
Quand d’Hernani sonnait le cor.

… La nuit tombe et met avec l’ombre
Ses terreurs aux recoins dormants.
L’inconnu, machiniste sombre,
Monte ses épouvantements.

Des explosions de bougies
Crèvent soudain sur les flambeaux !
Leurs auréoles élargies
Semblent des lampes de tombeaux.

Une main d’ombre ouvre la porte
Sans en faire grincer la clé.
D’hôtes pâles qu’un souffle apporte
Le salon se trouve peuplé.

Les portraits quittent la muraille,
Frottant de leurs mouchoirs jaunis,
Sur leur visage qui s’éraille,
La crasse fauve du vernis.