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Sur la vitre des mansardes
Elle étale ses pâleurs,
Et fait aux lunes blafardes
Un teint de pâles couleurs.

Des Vénus trop court vêtues
En cachant la nudité,
La neige tisse aux statues
Un voile de chastité.

Bonne en ces heures maussades,
En ces mortelles saisons,
Elle fournit des glissades
Pour la jeu des polissons !

Elle coiffe la montagne
D’un cimier fol et changeant,
Et jette sur la campagne
Son manteau de vif-argent.

Sous les pieds de la fillette
Elle étend son blanc tapis,
Et pour l’amant qui la guette
Rend ses pas plus assoupis.

Elle attache la pituite
Au nez transi des bourgeois ;
Mais au rêveur qui médite
Elle dit, trouvant la voix :

« C’est moi qui suis ta Giselle,
Ta vaporeuse willi ;
Je suis jeune, je suis belle,
J’ai froid ; — ouvre-moi ton lit !