Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 2, Lemerre, 1890.djvu/207

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Au prix de tant de sacrifices,
Sur des débris encor fumants !
Surtout laisse toujours l’idée,
A ton oreille non gardée,
Chuchoter le verbe nouveau ;
C’est par le verbe qu’on gouverne,
Et le diadème moderne
N’est que le cercle d’un cerveau !

Que le sculpteur et le poète
Avec le marbre, avec le vers,
D’une forme noble et parfaite
Parent le nouvel univers !
Que palais, tours, dômes, églises,
Sur le ciel des villes surprises,
Tracent, en lettres de granit,
Les symboles et les pensées
Des générations poussées
Sur le vieux monde rajeuni.

Du haut de ta gloire étoilée,
Songe à ceux qui souffrent en bas ;
Secours la misère voilée,
Au génie obscur tends les bras !
Sois le monarque et le pontife,
Et rends l’antique hiéroglyphe
Pour tous intelligible et clair ;
Que sur ta tête la tiare
Brille dans l’ombre, comme un phare,
Au bord du peuple — cette mer !

Mais ce beau jour n’est qu’une aurore,
Un rêve où l’âme se complaît ;
L’homme n’est qu’un enfant encore,