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DEUX TABLEAUX
DE VALDÈS LÉAL



Après
l’autel sculpté, le Moïse célèbre,
Et le saint Jean de Dieu sous sa charge funèbre,
À Séville on fait voir, dans le grand hôpital,
Deux tableaux singuliers de Juan Valdès Léal.

Ce Valdès possédait, Young de la peinture,
Les secrets de la mort et de la sépulture ;
Comme le Titien les splendides couleurs,
Il aimait les tons verts, les blafardes pâleurs,
Le sang de la blessure et le pus de la plaie,
Les martyrs en lambeaux étalés sur la claie,
Les cadavres pourris, et dans des plats d’argent,
Parmi du sang caillé, les têtes de saint Jean ;
— Un vrai peintre espagnol, catholique et féroce,
Par la laideur terrible et la souffrance atroce,
Redoublant dans le cœur de l’homme épouvanté
L’angoisse de l’enfer et de l’éternité.

Le premier, toile étrange où manquent les figures,
N’est qu’un vaste fouillis d’étoffes, de dorures,