Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome III.djvu/90

Cette page n’a pas encore été corrigée

e A, laquelle a le même rapport avec Dieu que A elle-même (par la Propos. 20, partie 2, dont la démonstration est générale). Or, l’idée A se rapporte, par l’hypothèse, à Dieu en tant qu’il est exprimé par la nature de l’âme humaine. Donc l’idée de A aura avec Dieu le même rapport, c’est-à-dire (par le Corollaire de la Propos. 11, partie 2) que cette idée adéquate de l’idée A sera aussi dans cette âme qui possède déjà l’idée A ; par conséquent, celui qui a une idée adéquate, en d’autres termes (par la Propos. 34, part. 2), celui qui connaît une chose selon sa vraie nature, doit avoir en même temps de sa connaissance une idée adéquate, c’est-à-dire une connaissance vraie, et par une suite évidente posséder la certitude. C. Q. F. D.

Scholie : J’ai expliqué (dans le Schol. de la Propos. 21, part. 2) en quoi consiste l’idée d’une idée. Mais il faut remarquer que la précédente proposition est, de soi, assez évidente. Il n’est personne, en effet, qui, ayant une idée vraie, ignore qu’une idée vraie enveloppe la certitude ; car qu’est-ce qu’avoir une idée vraie ? c’est connaître parfaitement, ou aussi bien que possible, une chose. On ne peut donc nous contredire ici, à moins de s’imaginer qu’une idée est une chose muette et inanimée, comme une peinture, et non un mode de la pensée, et l’acte même du penser. D’ailleurs, je le demande, qui peut savoir qu’il comprend une certaine chose, si déjà il ne l’a comprise ? En d’autres termes, si déjà vous n’êtes certain d’une chose, comment pouvez-vous savoir que vous en êtes certain ? Et puis, quelle règle de vérité trouvera-t-on plus claire et plus certaine qu’une idée vrai ? Certes, de même que la lumière se montre soi-même et avec soi montre les ténèbres, ainsi la vérité est à elle-même son criterium et elle est aussi celui de l’erreur.

Cela suffit, à mon avis, pour répondre à tout cet ordre de questions. Si, en effet, une idée vraie ne se distingue d’une idée fausse que par sa convenance avec son objet, il en résulte donc qu’une idée vraie ne surpasse pas une idée fausse