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elles sont déterminées à exister et à agir de telle ou telle façon (par la Propos. 29). Si donc les choses pouvaient être autres qu’elles ne sont ou être déterminées à agir d’une autre façon, de telle sorte que l’ordre de la nature fût différent, il faudrait aussi que la nature de Dieu pût être autre qu’elle n’est ; d’où il résulterait que cette autre nature divine (par la Propos. 11) devrait aussi exister, et il y aurait deux ou plusieurs dieux, ce qui est absurde (par le Coroll. 1 de la Propos. 14). Par conséquent, les choses n’ont pu être produites d’une autre façon, etc. C. Q. F. D.

Scholie I : Puisqu’il est aussi clair que le jour, par ce que je viens de dire, qu’il n’y a absolument rien dans les choses qui les doive faire appeler contingentes, je veux expliquer ici en peu de mots ce qu’il faut entendre par un contingent ; mais il convient auparavant de définir le nécessaire et l’impossible. Une chose est dite nécessaire, soit sous le rapport de son essence, soit sous le rapport de sa cause. Car l’existence d’une chose résulte nécessairement, soit de son essence ou de sa définition, soit d’une cause efficiente donnée. C’est aussi sous ce double rapport qu’une chose est dite impossible, soit que son essence ou sa définition implique contradiction, soit qu’il n’existe aucune cause extérieure déterminée à la produire. Mais une chose ne peut être appelée contingente que relativement au défaut de notre connaissance. Quand nous ignorons en effet si une certaine chose implique en soi contradiction, ou bien quand, sachant qu’il n’y a aucune contradiction dans son essence, nous ne pouvons toutefois rien affirmer sur son existence parce que l’ordre des causes nous est caché, alors cette chose ne peut nous paraître nécessaire ni impossible, et nous l’appelons à cause de cela contingente ou possible.

Scholie II : Il suit clairement de ce qui précède que les choses ont été produites par Dieu avec une haute perfection ; elles ont en effet résulté nécessairement de l’existence d’une nature souverainement parfaite. Et en