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est plus près d’un orgueilleux qu’un homme abject (voyez le Schol. de la Propos. 57, part. 4).


CHAPITRE XXIII

La honte est encore un moyen de concorde, mais seulement en ce qui regarde les choses qui peuvent être cachées. Du reste, la honte étant une sorte de tristesse n’a rien à voir avec l’usage de la raison.


CHAPITRE XXIV

Les autres passions dont l’homme est l’objet, et qui naissent de la tristesse, sont directement contraires à la justice, à l’équité, à l’honnêteté, à la piété et à la religion ; et bien que l’indignation ait une apparence d’équité, il n’en est pas moins vrai que tout régime légal est impossible là où chacun se fait juge des actions d’autrui, et prend en main la défense de ses propres droits et de ceux des autres.


CHAPITRE XXV

La modestie, c’est-à-dire le désir de plaire aux hommes, fondé sur la raison, se rapporte à la piété (voyez le Schol. de la Propos. 37, part. 4). Mais si ce désir vient des passions, il se rapporte alors à l’ambition, qui, sous une fausse apparence de piété, n’enfante que discordes et séditions. En effet, celui qui désire aider ses semblables à jouir tous ensemble du souverain bien, soit en leur donnant ses conseils, soit en leur rendant des services effectifs, s’efforce avant tout de se concilier leur amour, au lieu de chercher à les frapper d’admiration, afin que son nom reste attaché à la doctrine qu’il leur enseigne ; il met, tous ses soins à ne faire naître en eux aucun sujet d’envie. Dans les entretiens publics, il s’abstient de déclamer sur les vices des hommes, et s’il parle de l’impuissance humaine, il n’en parle qu’avec mesure ; au contraire, il s’étend avec abondance sur la vertu ou la puissance de l’homme, et sur les voies où il doit marcher pour vivre, autant que possible, suivant les commandements de la raison, non par crainte ou par aversion, mais par des sentiments où domine la joie.


CHAPITRE XXVI

Excepté l’homme, nous ne connaissons dans la nature aucun être particulier dont l’âme nous puisse rendre heureux, et avec l’amitié nous puisse