Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome III.djvu/216

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des louanges des hommes que la raison gouverne, comme le déshonnête est ce qui est contraire à la formation de l’amitié. J’ai expliqué en outre quels sont les fondements de l’État, et il est aisé aussi de déduire de ce qui précède la différence qui sépare la vertu véritable de l’impuissance. La vertu véritable n’est autre chose, en effet, qu’une vie réglée par la raison ; et par conséquent l’impuissance consiste en ce seul point que l’homme se laisse gouverner par les objets du dehors et déterminer par eux à des actions qui sont en harmonie avec la constitution commune des choses extérieures, mais non avec sa propre nature, considérée en elle-même. Tels sont les principes que, dans le Schol. de la Propos 18, part. 4, j’avais promis d’expliquer. Ils font voir clairement que la loi qui défend de tuer les animaux est fondée bien plus sur une vaine superstition et une pitié de femme que sur la saine raison ; la raison nous enseigne, en effet, que la nécessité de chercher ce qui nous est utile nous lie aux autres hommes, mais nullement aux animaux ou aux choses d’une autre nature que la nôtre. Le droit qu’elles ont contre nous, nous l’avons contre elles. Ajoutez à cela que le droit de chacun se mesurant par sa vertu ou par sa puissance, le droit des hommes sur les animaux est bien supérieur à celui des animaux sur les hommes. Ce n’est pas que je refuse le sentiment aux bêtes. Ce que je dis, c’est qu’il n’y a pas là de raison pour ne pas chercher ce qui nous est utile, et par conséquent pour ne pas en user avec les animaux comme il convient à nos intérêts, leur nature n’étant pas conforme à la nôtre, et leurs passions étant radicalement différentes de nos passions (voy. le Schol. de la Propos. 57, part. 3). Il me reste à expliquer en quoi consistent le juste, l’injuste, le péché et le mérite. C’est ce que je vais faire dans le Scholie suivant.

Scholie II : J’ai promis, dans l’appendice de la première partie, d’expliquer en quoi consistent la louange et le blâme, le mérite et le péché, le juste et l’injuste. Pour